Breath made visible

Affiche Breath made visible
Réalisé par Ruedi Gerber
Pays de production U.S.A., Suisse
Année 2010
Durée
Musique Mario Grigorov
Genre Documentaire
Distributeur Nour Films
Acteurs Anna Halprin, Lawrence Halprin, Daria Halprin, Rana Halprin, Merce Cunningham
Age légal 7 ans
Age suggéré 16 ans
N° cinéfeuilles 617
Bande annonce (Allociné)

Critique

Ce film s’offre à Anna Halprin comme une page blanche dans laquelle elle écrit librement son histoire. La danseuse, célèbre pour avoir non seulement fait partie des grandes révolutions de la danse mais aussi pour les avoir suscitées, est née en 1920, dans l’Illinois. Filmée à plus de 80 ans par le cinéaste suisse Ruedi Gerber, elle lui propose, à lui et à son public, une formidable réflexion sur ce qu’est l’art, essence même de la vie. «Qu’est-ce que la danse, s’interroge-t-elle? Pourquoi dansons-nous? Pour qui dansons-nous? La danse n’est-elle pas ce qui rend le souffle visible?» D’où le titre de ce beau documentaire.

La danse, pour Anna Halprin, c’est la raison d’être d’une existence entière. Commencée à 5 ans, dans la pure tradition des tutus, des chaussons et des entrechats, elle est rapidement convertie en recherche, en expérimentations, en explorations, en performances. Car si danser c’est vivre, on ne peut le faire dans les règles figées du ballet classique. C’est ainsi qu’Anna Halprin captive le monde, le surprend, le rebute parfois, mais finit par emporter l’adhésion, aux côtés notamment de son alter ego Merce Cunningham.

Et puis, le cancer l’abat. Une fois, deux fois. Elle le prend à bras-le-corps et le danse. «Avant d’avoir eu le cancer, explique-t-elle, je vivais ma vie pour mon art, après avoir eu le cancer je vivais mon art pour ma vie.» Puis, les années passant, c’est le vieillissement qui s’impose, le corps, beau et exalté par l’esthétique choisie d’un mouvement, ce corps s’affadit, perd de sa superbe; inéluctablement, la mort se rapproche. Là encore, la danse est une réponse: elle embellit en dépassant l’apparence, elle continue à rendre le souffle visible.

Une existence entière vouée à la danse, à l’exercer n’importe où, à chercher le geste jusque dans sa cuisine ou sur son vélo, Anna Halprin ne s’arrête jamais, aidée, soutenue par Lawrence Halprin, son mari; l’architecte paysagiste a construit pour elle une superbe scène en plein air, comme une sculpture dans les bois. Elle y reçoit ses élèves et ses amis chorégraphes pour de nouvelles approches.

Le film de Ruedi Gerber est infiniment respectueux de l’artiste. Il choisit de riches documents d’archives - beaucoup sont inédits - à travers lesquels la philosophie de la danseuse se fait contagieuse. Il n’y a pas de personnes ni d’événements particuliers à qui l’art soit réservé. «Nous avons tous, dès la naissance, le droit de danser», dit Anna Halprin. L’art doit respirer dans toute vie humaine, de sa première à son ultime manifestation…

Geneviève Praplan