Solutions locales pour un désordre global

Affiche Solutions locales pour un désordre global
Réalisé par Coline Serreau
Pays de production France
Année 2010
Durée
Musique Madeleine Besson
Genre Documentaire
Distributeur Memento Films Distribution
Acteurs Dominique Guillet, Vandana Shiva, Ana Primavesi, Philippe Desbrosses, Pierre Rabhi
Age légal 7 ans
Age suggéré 12 ans
N° cinéfeuilles 613
Bande annonce (Allociné)

Critique

Le film de Coline Serreau, documentaire engagé sur l’écologie et l’agriculture biologique, débute par une histoire qui a échappé à beaucoup de monde, celle des surplus chimiques et toxiques de combat des guerres mondiales - surtout la Seconde -, que les fabricants ont écoulés dans l’agriculture des pays riches, forçant les paysans à s’équiper lourdement et à s’endetter au-delà du supportable.

Ce fut le début de la terrible histoire d’une dépossession des techniques et l’incroyable confiscation des semences, domaine souvent réservé dans le tiers monde aux femmes qui les récoltaient et les conservaient jalousement, sachant qu’elles sont la garantie de la survie de leur famille. On découvre qu’en France aussi cette confiscation a encore cours, les producteurs de fruits et de légumes devant payer des amendes pour diffuser et planter des graines anciennes «non répertoriées» dans les catalogues officiels et donc non autorisées, alors que des milliers d’espèces de fruits ont disparu.

Caméra au poing, Coline Serreau a parcouru le monde pour dénoncer la stérilisation galopante des sols et la mort de millions de petits paysans. En Inde par exemple, des agriculteurs, désespérés, se suicident chaque jour. Au Brésil, les paysans sans terre ont dû se battre et s’organiser pour survivre. Le propos de la réalisatrice à qui l’on devait TROIS HOMMES ET UN COUFFIN n’est pas de nous démoraliser, mais de provoquer une sorte d’électrochoc, puis de nous montrer, exemples à l’appui, que des solutions écologique et naturelle existent, qui fonctionnent sans nuire à la terre, à notre environnement, encore moins aux humains. Elle s’attache à des exemples d’agriculture alternative qui n’ont recours ni à la chimie ni aux pesticides, ni aux labours violents et trop profonds stérilisant la terre. Et ça marche. Elle cite de nombreux exemples, en Ukraine, au Brésil, en Inde, en France.

Coline Serreau a construit son film autour de quelques personnages hauts en couleur, aux convictions militantes assorties à leur savoir scientifique: des agronomes amoureux de la terre, des biologistes, des économistes qui ont pris le parti de la liberté et qui dénoncent ce que ne veulent pas dévoiler des multinationales ayant fait main basse sur le vivant: Pierre Rahbi, l’un des pionniers de l’agriculture écologique en France; Vandana Shiva, physicienne indienne, épistémologue, diplômée en philosophie des sciences, qui défend l’agriculture paysanne et biologique et se bat pour mettre en garde contre les effets pervers du génie génétique; Devinder Sharma, ingénieur agronome indien, journaliste et écrivain; Philippe Desbrosses, docteur en sciences de l’environnement et promoteur de la biodiversité; Serge Latouche, professeur d’économie, spécialiste des rapports économiques et culturels Nord-Sud; Claude Bourguignon, microbiologiste des sols, qui explique ce qui fait vivre un sol et pourquoi il est urgent de sauver ce capital-là. Coline Serreau nous incite à ne pas baisser les bras mais à privilégier les filières biologiques qui peuvent nourrir la planète sans la désertifier, à consommer des produits de chez nous. «Partout sur la planète, constate la réalisatrice, souvent sans se connaître, des gens tentent des expériences qui se ressemblent. Il n’y a pas de mots d’ordre. Chacun invente. Il ne s’agit pas de verser dans la naïveté mais de faire confiance aux forces humaines.» La réalisatrice souligne avec force - et là on reconnaît la militante féministe qu’elle est -, par la voix de l’Indienne Vandana Shiva, que l’agriculture d’aujourd’hui est pensée par les hommes. «Le patriarcat est une maladie infantile de l’humanité qui se traduit par un déséquilibre des pouvoirs entre les deux moitiés qui la composent et la fait courir à sa perte. Il est urgent que les femmes, qualifiées pour s’occuper de la terre et pour la réparer, prennent aujourd’hui le pouvoir.» Le film ne laisse pas indifférent face à notre terre si maltraitée. Dommage que la caméra de Coline Serreau soit si agitée et sautillante. C’est fatigant pour les yeux. Alors, parfois, on les ferme, pour mieux se concentrer sur les propos des intervenants.