Critique
C'est à une longue romance, sur fond de terreur stalinienne, que le réalisateur français Régis Wargnier convie le public. En 1946, le Petit Père a lancé une vaste propagande en Occident, afin que les Russes exilés reviennent au pays. Tentés par la promesse d'une amnistie et d'un passeport soviétique, ils ont cru avec exaltation au projet de reconstruire l'URSS. On sait ce qui les attendait. Régis Wargnier s'inspire de ce moment d'histoire. Il met en scène un couple, un médecin russe (Oleg Menchikov) et son épouse française (Sandrine Bonnaire), qui comprend dès l'arrivée à quel point il s'est laissé tromper. Il mesure l'erreur et le danger de vouloir brusquer les choses. Elle ne comprend pas, n'a aucune patience, et les précipite, eux et leurs fils, dans des risques mortels. Ce n'est pas l'histoire ici qui est en jeu, c'est l'amour. Peut-il résister à des années de souffrance, de silence et d'indispensable mensonge?
La réponse dépend du roman que l'on veut faire. On aurait préféré plus de réalisme, moins d'esthétisme, pour la dernière réalisation de Wargnier. L'esprit d'INDOCHINE n'est pas très loin, avec ses mérites et ses défauts. EST-OUEST est un film au classicisme soigné, beau et grave, mais dans la veine trop complaisamment sentimentale du DOCTEUR JIVAGO. Il y manque l'invention et du piquant.
Geneviève Praplan