The Sound of Insects

Affiche The Sound of Insects
Réalisé par Peter Liechti
Pays de production
Genre
Acteurs Jennifer Peedom
N° cinéfeuilles 611

Critique

Inspiré d’un fait-divers réel, THE SOUND OF INSECTS est la relation entomographique, on pourrait dire le rapport de biopsie d’un suicide par inanition. Au travers de la brume d’un matin hivernal blafard, on discerne quelques véhicules et des silhouettes humaines à l’orée d’une forêt puis, sortant du sous-bois givré, deux hommes portant un «sac à viande» (comme dit le jargon des médecins-légistes). L’enveloppe contient le cadavre momifié d’un homme d’une trentaine d’années, plutôt grand, ne pesant que 35 kilos. Sur la dépouille, on a trouvé un cahier dans lequel le défunt a tenu son journal.

Commence alors la lecture de ce texte en voix off, illustrée par des vues de la clairière où l’homme s’est bricolé un abri avec quelques branches et des bâches de plastique. Un monde désert où l’on ne voit âme qui vive, sinon quelques insectes parcourant le couvert transparent emperlé de pluie et une fois, de loin, un écureuil - et puis, çà et là, des scènes grisâtres d’une vie urbaine anonyme. Le candidat au suicide, qui ne s’explique pas sur ses motifs, a choisi l’isolement absolu pour en finir, estimant à une semaine la durée de son agonie (62 jours). Celle-ci se prolonge bien au-delà de ses prévisions, et il note ses impressions quotidiennes, jalonnées par les deux heures d’écoute radiophonique qu’il s’octroie. Le jeûne qu’il s’impose le fait passer des simples constats physiologiques à une réflexion plus spirituelle. Après le tumulte de la ville, il entend enfin le son des insectes. La forêt, qui au début pouvait paraître menaçante comme celle d’ANTICHRIST, devient le témoin muet et indifférent de son cheminement, qui lui rappelle que Jésus et Bouddha ont jeûné pendant 40 jours.

Un récit de l’écrivain japonais Shimada Masahiko a inspiré Peter Liechti, qui a aussi convoqué Beckett (La mort de Malone, Dante (L’Enfer, Bach... Le plastique ponctué d’aiguilles de sapin et d’insectes devient estampe et calligraphie.

Une œuvre cinématographique sans concession, mais une réflexion sur la mort qui aurait pu être plus aboutie.

Daniel Grivel