Critique
Mousse (Isabelle Carré) et Louis (Melvil Poupaud) vivent ensemble. Ils se droguent. Un jour c’est l’overdose, et Louis meurt. Voilà pour les toutes premières séquences. Mousse, elle, survit, et apprend qu’elle est enceinte. Elle décide de garder son enfant, quitte Paris et se retire dans une maison de campagne au bord de la mer. Paul (Louis-Ronan Choisy), le frère homosexuel de Louis, la rejoint et tous deux vont tenter de vivre côte à côte, dans ce grand «refuge» qu’ils ne quitteront guère, sinon pour aller se baigner. Ils ne croiseront qu’un ou deux autres personnages. LE REFUGE abandonnera le spectateur sur un point d’orgue, ou plutôt dans le flou.
SOUS LE SABLE avait permis à François Ozon, en 2001, de se faire connaître. Réalisateur prolixe - il signe un film chaque année -, il n’a pas réussi, depuis lors, à renouer avec le succès public, sinon peut-être avec 8 FEMMES (2002). Son dernier opus, LE REFUGE, ne convainc guère. Aux thèmes favoris du cinéaste - ceux de la disparition, du deuil, de l’errance, de la marginalité sexuelle - s’ajoute ici une forme de fascination pour le corps, celui de Mousse, porteuse de vie (et d’espoir?) A travers des personnages assez flottants, issus d’une société qui apparaît aisée et désœuvrée, Ozon dresse incidemment le tableau d’un milieu cossu et déconnecté de la réalité (de quoi vivent-ils?) L’intrigue est réduite au minimum, on parle peu dans ce film d’un réalisme quasi mutique, les rares échanges ne débouchant que sur des considérations qui n’éclairent guère le propos du cinéaste. La mise en scène est assez plate et les décors sont peu révélateurs des états d’âme des protagonistes. Les gros plans abondent, le film paraît préparé pour le petit écran - la présence de France 2 au générique semble le confirmer - et Isabelle Carré, dans son rôle de grande adolescente enceinte, ne réussit pas, à elle seule, à sauver le film d’un certain ennui.
Antoine Rochat