Critique
Avec sa vieille jeep, Mam Daldar circule de village en village. Il est postier dans les montagnes du Kurdistan irakien, un postier pas comme les autres puisque les messages qu’il transmet sont enregistrés sur de petites cassettes. Un jour, un commandant de partisans lui demande d’aller enregistrer dans son village les premiers pleurs de son enfant qui va naître. Sur sa route, Mam Dalbar découvre que tous les habitants de ce village ont été conduits dans une vallée éloignée, par mesures de sécurité. Il va donc tenter de les rejoindre là…
Un (premier) film très fort et superbe. Le cinéaste kurde rappelle, dans un langage politique et poétique à la fois, que la communication entre les habitants du Kurdistan irakien est avant tout une question de vie et de mort. Au volant de sa camionnette, le vieil homme est un messager. Même rapporteur de mauvaises nouvelles, il transmet des voix, il entretient des contacts. LE MURMURE DU VENT est un splendide poème visuel, construit autour d’images fortes et de séquences que l’on n’oubliera pas. Shahram Alidi promène une caméra apparemment nonchalante, presque sans insistance, dans des décors dépouillés, de toute beauté. Il y a des moments porteurs d’une grande émotion: un gamin écrit son message éphémère sur les fenêtres salies du véhicule, on assiste à un mariage, on croise des veuves qui se confondent avec les pierres du paysage, on découvre les exactions de l’armée irakienne (c’est la guerre Iran-Irak) -, le village est détruit, le mariage s’est achevé tragiquement. LE MURMURE DU VENT est un cri de résistance, un cri de douleur.
Antoine Rochat