Critique
C’est l’histoire d’amour interminable entre une duchesse et un héros de guerre bonapartiste, sous la Restauration. Rivette adapte une nouvelle fois Balzac. Aidé par un duo de comédiens investis, il joue très habilement avec la glace et le feu.
Jacques Rivette adapte La Duchesse de Langeais, un des épisodes de la Comédie Humaine. Il s’agit d’une adaptation «en costumes», située avec précision dans son époque, ce qui est cohérent par rapport au roman. Le titre est celui qu’avait initialement prévu Balzac. Il fait référence à une anecdote sur la hache qui a décapité Charles Ier. Rivette décrit un amour passionnel, avec la sobriété et la distance qui conviennent à une «étude de mœurs», et c’est ce contraste qui intrigue et qui crée l’intérêt du film. La reconstitution de la société fantomatique de la Restauration, que l’on ne voit que dans les salons, est, par ailleurs, parfaite. Quant à la longueur du film, si elle peut rebuter, elle crée aussi une atmosphère captivante, faite de répétitions et de rendez-vous manqués. Elle permet en outre de glisser au-delà des apparences: celles qu’entretiennent à la fois des personnages et un film qui semblent totalement froids et sous contrôle. Ainsi, sans quitter sa rigidité de façade, le film laisse entrevoir peu à peu une exaspération rentrée, une part de folie qui grandit. Jeanne Balibar est totalement à l’aise dans le rôle d’une femme à la fois mystérieuse et irritante. Quant à Guillaume Depardieu, il incarne magistralement, avec tout son corps, l’amoureux torturé et vengeur. A travers eux, quelque chose de profond sur les rapports amoureux s’exprime de façon épidermique.
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