Regarde-moi

Affiche Regarde-moi
Réalisé par Audrey Estrougo
Pays de production France
Année 2007
Durée
Musique Akhenaton
Genre Drame, Romance
Distributeur Gaumont Distribution
Acteurs Salomé Stévenin, Emilie de Preissac, Terry Nimajimbe, Eye Haidara, Paco Boublard
N° cinéfeuilles 554
Bande annonce (Allociné)

Critique

REGARDE-MOI commence par irriter: encore une bande d’adolescents désœuvrés qui se traînent dans une cité de banlieue en se disputant. Dialogues confus, hargne, susceptibilité à fleur de peau, tout cela ne titille guère la curiosité.

On aurait tort toutefois de jeter l’éponge à ce moment-là: le film va trouver par la suite son rythme et un style propre. La jeune cinéaste Audrey Estrougo parle de ce qu’elle a connu - quatre ans de vie en banlieue parisienne - et son film plonge dans ce monde qu’elle définit comme «sans foi, ni loi», partagé en deux, au sein duquel filles et garçons constituent des clans séparés, bâtis souvent sur une opposition de couleur de peau.

Il n’y a pas de véritable histoire dans ce film, qui se lit en deux temps: le premier sera consacré au monde des garçons, avec leur propre code de conduite, leur vision du monde, leur fierté, leur comportement vis-à-vis des filles. Ce sera ensuite le monde des filles: une fille, ça se doit de jouer au garçon pour exister et se faire entendre. Il s’agit de se renier soi-même, en quelque sorte. Deux mondes séparés, en colère, où les frustrations, les violences verbales vont jusqu’à entraîner des réactions d’intolérance et de racisme. Les parents là-dedans? Absents, ou hors course. Tous ces adolescents sont au chômage, semble-t-il, ou se livrent à de petits trafics. Un seul d’entre eux, Jo, paraît vouloir s’en sortir. Par le foot?

La cinéaste n’a pas choisi le terrain du débat socio-politique et limite son propos à un simple constat: les meilleures séquences restent celles où la réalisatrice - par la répétition de plusieurs mêmes scènes filmées sous des angles différents, adoptant un autre point de vue - réussit à montrer la complexité de certaines situations.

Rien d’optimiste dans ce tableau assez cru: la violence, la haine, le mal-être font partie du quotidien. On portera au crédit d’Audrey Estrougo une mise en images qui n’est pas laissée au hasard, une interprétation excellente de la part des jeunes acteurs, bien choisis et bien dirigés. Formellement maîtrisé, REGARDE-MOI est un film de fiction se situant très souvent aux frontières du documentaire. On aurait souhaité cependant y découvrir un positionnement plus marqué de son auteur.

Antoine Rochat