Un cœur invaincu

Affiche Un cœur invaincu
Réalisé par Michael Winterbottom
Pays de production U.S.A., Grande-Bretagne
Année 2007
Durée
Musique Harry Escott, Molly Nyman
Genre Drame, Historique, Thriller
Distributeur Paramount Pictures France
Acteurs Angelina Jolie, Will Patton, Archie Panjabi, Dan Futterman, Jillian Armenante
N° cinéfeuilles 548
Bande annonce (Allociné)

Critique

De précédents films de Winterbottom (WELCOME TO SARAJEVO, ROAD TO GUANTANAMO) montrent que le réalisateur britannique s'intéresse de près à l'histoire on ne peut plus contemporaine. Celui présenté à Cannes est tiré du livre-témoignage de Mariane, femme de Daniel Pearl, chef du bureau Asie du Sud du Wall Street Journal. Après l'écrasement des talibans en Afghanistan et le départ de centaines de journalistes, le couple s'était rendu à Karachi pour les besoins d'une investigation sur des terroristes musulmans.

Aiguillé par un mystérieux informateur, Daniel Pearl avait rendez-vous dans un établissement public - garantie d'une relative sécurité - avec un chef islamiste. Il disparut et, quelque temps plus tard, un groupe annonçait qu'il le tenait en otage, dans les mêmes conditions que celles réservées aux prisonniers de Guantanamo. Les services secrets pakistanais, l'ambassade américaine, la CIA et la direction du journal sont sur les dents; l'enquête se complique par le fait que les Pearl étaient juifs et qu'ils logeaient chez une amie indienne, donc considérée comme espionne par les autorités pakistanaises. Ajoutez à cela une nébuleuse de groupes terroristes: une chatte n'y retrouverait pas ses petits.

On sait que, après des communiqués contradictoires, une vidéo a montré la décapitation du journaliste et que sa dépouille a été retrouvée en morceaux dans un terrain vague de Karachi.

Mariane, sa veuve, qui avait espéré jusqu'au bout que son mari s'en sortirait, a écrit un livre pour que son fils connaisse le père qu'il n'aura jamais vu.

De facture classique, bien interprété, ce film factuel au point qu'il suscite peu d'émotion délivre néanmoins un message fort.



Daniel Grivel





Le sujet n’est pas facile, s’ouvrant sur des pistes multiples qui toutes, méritent d’être approfondies, forcément aux dépens des autres. Le piège des larmes n’en est jamais très loin, ce piège mauvais pour la réflexion, excellent pour les bénéfices. Mais on ne peut mettre en doute la bonne foi de Michael Winterbottom et la sincérité avec laquelle il veut rendre compte d’une réalité.

UN CŒUR INVAINCU est produit par Brad Pitt, avec sa compagne, Angelina Jolie, dans le rôle principal, celui de Mariane Pearl, épouse de Daniel Pearl, disparu tragiquement en 2003 au Pakistan. Pearl était un journaliste, de ceux qui essaient d’éviter les amalgames et d’approcher le plus possible de la vérité. Malgré ce souci d’objectivité, il a été enlevé à Karachi par un groupe de terroristes, condamné comme espion étasunien et assassiné. Sa décapitation a été filmée par les ravisseurs.

Au cœur de toutes les questions et les réflexions que pose un tel acte, Winterbottom privilégie l’enquête policière et le point de vue de Mariane Pearl. Il semble filmer à vif, les allées et venues dans le doute, le sentiment de tourner en rond, tant de l’épouse, que de ses amis et des policiers eux-mêmes. Cet aspect-là est le mieux réussi du film. Malgré un montage haché qui veut manifester l’urgence, au risque d’apporter de la confusion au récit. Contrebalancé, c’est vrai, par l’insertion de panoramiques sur une ville soudain assoupie.

Quelque chose ne colle pas dans ce film taillé dans les bonnes intentions et soucieux de ne pas en faire trop. Il en fait trop, justement, en se concentrant sur le drame de l’épouse, en laissant en coulisses la réalité du terrorisme et celle du terreau dans lequel il se fortifie, la situation en tenaille du Pakistan, le travail de la presse. Le film se contente d’être un film policier avec, au cœur de l’enquête, une femme enceinte au demeurant pas très bien interprétée par Angelina Jolie, forçant l’apitoiement alors qu’elle fait tout pour l’éviter. Pourquoi ces plans répétés du bel enfant pakistanais dans la cour? Pourquoi cette fin interminable? Pourquoi ces hurlements qui brisent l’immensité d’une douleur tellement mieux perçue à travers la suggestion?

On reste à fleur de peau d’un sujet d’une grande densité. Mais le spectateur peut en tirer une leçon: chaque jour, des journalistes luttent, dans des conditions difficiles, pour rendre compte d’une actualité que le public délaisse au profit des potins mondains et des faits divers. Depuis le début de l’année, 63 journalistes ont été tués, 133 sont en prison.



Geneviève Praplan

Ancien membre