Ma mondialisation

Affiche Ma mondialisation
Réalisé par Gilles Perret
Pays de production
Genre
Acteurs Jennifer Peedom
Age légal 10 ans
Age suggéré 16 ans
N° cinéfeuilles 543

Critique

"Dans la vallée de l'Arve, quelque 12'000 salariés travaillent encore dans des usines de décolletage fournissant des pièces de mécanique de précision à l'industrie automobile. Mais le marché mondial de la voiture exerce sur ces entreprises une pression de plus en plus forte pour qu'elles délocalisent l'essentiel de leurs activités à l'étranger. Abdiquer signifierait supprimer des centaines d'emplois, leur résister entraîne l'arrêt des commandes et le dépôt de bilan: les patrons sont pris entre le marteau et l'enclume.

Personnage central de MA MONDIALISATION, Yves Bontaz emploie un millier de personnes (300 en Haute-Savoie et 700 en Chine et en République tchèque). Âgé d'une soixantaine d'années, il est l'incarnation du ""patron"" et c'est à travers son regard de chef d'entreprise plutôt ""atypique"" que le cinéaste documentariste Gilles Perret nous fait découvrir comment se manifeste aujourd'hui un capitalisme dominé par des mécanismes globaux et implacables. ""Abominables"", dira même un autre patron.

Au fil de visites sur les trois sites de sa production (Haute-Savoie, Chine et Tchéquie), Yves Bontaz évoque pêle-mêle son passé, ses difficultés actuelles, ses priorités (économiques ou humaines) et son avenir. Jovial de nature, ""à tu et à toi"" avec certains de ses ouvriers savoyards, il apparaît comme un ""bon"" patron. Même s'il ne parle ni tchèque, ni chinois, même s'il ne connaît pas les réalités sociales et humaines des pays vers lesquels il délocalise, même s'il ignore le tarif horaire de rémunération de ses employés étrangers.

MA MONDIALISATION est un documentaire intéressant, riche et bien construit. Pour étayer son propos, Gilles Perret fait intervenir en cours de route des analystes économiques, des ouvriers (au travail ou en grève), des syndicalistes locaux, des responsables politiques de la région et d'autres dirigeants d'entreprises voisines. Les témoignages sont judicieux, éclairants. Tout le monde semble perdant. ""Le plus typique dans cette affaire, dit un économiste (Frédéric Lordon), c'est que c'est la réussite même de ces entreprises - qui sont sorties de l'étape familiale pour devenir des entreprises de taille conséquente - qui va être à l'origine de leurs ennuis.""

Le documentaire réalisé par Gilles Perret - son dixième film, il collabore régulièrement avec F3 - permet de lire facilement, comme en direct et en concentré, toute l'histoire récente du capitalisme. Voilà une excellente approche, tout à fait accessible, de ce que l'on appelle, sans savoir souvent comment l'expliciter, le phénomène de mondialisation. Rien qu'à ce titre-là il mérite d'être vu."

Antoine Rochat