Critique
La famille éclatée et son cortège de souffrances rentrées ou exprimées, la nouvelle amie du père, une intruse auprès des enfants, la mère désemparée qui tente de faire face, voilà un drame qui est tristement le reflet d'une réalité quotidienne. Le cinéma n'a pas manqué d'exploiter ce genre de situation, parce que c'est un filon mélodramatique de bon rapport, mais peut-être aussi pour en dénoncer les stigmates.
MA MEILLEURE ENNEMIE, dont le titre original est en fait BELLE-MERE, se situe parmi les bonnes approches de ce drame. Julia Roberts y incarne avec infiniment de tact, de gaucherie aussi, l'amie artiste d'un juriste qui essaie tant bien que mal de guider la barque familiale, ou ce qu'il en reste, entre les écueils que sont l'irrespect et le mépris des deux enfants envers leur belle-mère, les efforts maladroits de cette dernière pour leur être sympathique et la forte personnalité de l'épouse légitime, excellente Susan Sarandon. La situation va paradoxalement commencer à se décanter au moment où la maladie dont souffre la mère des deux enfants se développe d'une manière irréversible.
Avec la collusion de ce double cancer physique et familial, tous les ingrédients étaient réunis pour faire de ce film le plus banal ou le plus larmoyant des mélodrames. Grâce à un réalisateur qui a su éviter les pièges de la mièvrerie et du sentimentalisme, cette oeuvre s'avère pleine de sensibilité, elle pose de vraies questions, elle ne laissera vraisemblablement personne indifférent.
Georges Blanc