Critique
"Qui n'a pas lu le best-seller éponyme écrit à quatre mains par les journalistes Dominique Lapierre et Larry Collins et paru en 1971? Vendu à plus de 50 millions d'exemplaires, cet ouvrage se concentre sur 1948, année-charnière pour les Palestiniens et les Israéliens.
Aucun réalisateur n'avait osé jusqu'ici s'attaquer à ce pavé historico-sentimental. Costa-Gavras notamment avait déclaré forfait, craignant de ne pouvoir rester impartial face aux événements qui ont entouré la naissance de l'Etat d'Israël. Elie Chouraqui (QU'EST-CE QUI FAIT COURIR DAVID? MAN ON FIRE, HARRISON'S FLOWERS), fort de moyens considérables, s'y est essayé.
1947. On suit deux amis new-yorkais âgés de 27 ans, le juif Bobby Goldman (J. J. Feild) et Saïd Chahine (Saïd Taghmaoui), arabe de Jérusalem, dans leur bohème estudiantine. Leur amitié est renforcée par le fait qu'ils partagent les mêmes valeurs.
C'est pourquoi ils se sentent appelés à embarquer ensemble pour la Palestine, après la résolution des Nations Unies ordonnant le partage de ce territoire entre un Etat juif et un Etat arabe, un statut international étant réservé à la région de Jérusalem et de Bethléem. Grève générale, rejet du partage, immigration juive à grande échelle, affrontements entre la Légion arabe (troupe d'élite du roi Abdullah de Transjordanie), la Haganah (armée secrète juive), l'Irgoun et le groupe Stern (organisations terroristes juives), sous le regard de la Ligue arabe et de l'Agence juive.
Les deux amis se retrouvent enrôlés dans des camps opposés. Bobby participe aux efforts tendant à assurer le ravitaillement de Jérusalem, tandis que Saïd participe aux opérations de barrage des voies d'accès.
Patrick Bruel, dont la bouille de chanteur populaire est trop connue, peine à faire un combattant crédible, alors que Ian Holm campe un Ben Gourion assez réaliste. La reconstitution pèche par des touches anachroniques (jouets d'enfants qui ne sont pas d'époque, jeunes femmes au nombril à l'air...) et le film n'apporte rien de nouveau au débat.
Le soussigné se rappelle un propos recueilli lors d'un reportage radiophonique qu'il avait fait au lendemain de la guerre du Kippour: ""L'Occident a voulu réparer une injustice (la Shoah) par une autre injustice (la partition de la Palestine."" ""On a attendu 2'000 ans pour cette terre"", dit Jacob à Saïd qui lui répond: ""Les Arabes habitent cette terre depuis 2'000 ans."" Comment sortir de ce cercle vicieux?"
Daniel Grivel