Critique
"On se souvient qu'Al Gore, rival électoral de George W. Bush, n'est pas devenu président des Etats-Unis pour d'obscure raisons de dépouillement du scrutin, singulièrement dans l'Etat de Floride, gouverné par Jeb, frère de Bush... Le candidat malheureux ne s'est pas retiré sous sa tente pour autant: il a entrepris une longue croisade d'information sur le réchauffement climatique et ses conséquences, promenant au travers du pays une conférence, pour ne pas dire un show, bien rodée.
Davis Guggenheim travaille pour la télévision et cela se voit: son reportage pourrait passer tel quel sur le petit écran. Non content de se mettre à la place du public des conférences, il s'est fait l'ombre d'Al Gore, le suivant dans ses déplacements et apportant des éclairages plus intimistes sur l'ancien vice-président des Etats-Unis (que sa mission n'empêche pas de conduire parfois un 4x4...) Cela ne donne pas un chef-d'œuvre cinématographique, mais le message passe.
Il faut reconnaître que ce fils d'un homme de la terre a fait du chemin. Ce que l'on peut voir et entendre de lui sur scène révèle un vulgarisateur, un pédagogue et un communicateur hors pair. Il possède l'art des formules et des images qui frappent et qui s'impriment dans la mémoire. Sans prêchi-prêcha, sans discours culpabilisant, il éveille efficacement les consciences et met son charisme et sa notoriété au service d'une cause importante. Ce n'est déjà pas si mal!
Daniel Grivel
Candidat battu par le républicain Georges W. Bush lors de la présidentielle de l'an 2000, Al Gore a fait ce que personne n'attendait de lui: prendre la route et informer le monde entier de toutes les conséquences dramatiques du réchauffement climatique actuel. Le ""show"" qu'il a mis sur pied est une présentation multimédia de ce sujet, associant de façon originale humour, dessins et informations scientifiques.
UNE VERITE QUI DERANGE apparaît comme un ""appel aux armes"" adressé à son pays (aux autres aussi), invitant chacun à s'attaquer avec détermination, séance tenante, aux problèmes posés par un dérèglement majeur du système climatique. Al Gore a présenté son argumentaire plus de mille fois, n'ayant guère besoin de publicité pour rassembler un vaste auditoire, dans les écoles et les universités, dans les grandes comme dans les petites villes. Impressionnés par sa démonstration - fascinante et terrifiante à la fois - deux personnalités activement engagées dans les combats écologiques, Laurie David et le producteur Lawrence Bender, ont décidé de filmer le ""showman"" en action.
Ce ne sont pas les qualités cinématographiques qui sont les plus importantes dans ce documentaire de style télévisuel, mais bien plutôt la personnalité d'Al Gore et le sujet qu'il aborde. Le réalisateur Davis Guggenheim suit l'argumentation, sans prendre parti, sans cacher non plus l'urgence de l'appel lancé. Il y a là des photos chocs (la fonte ultrarapide des glaciers), des courbes de température alarmantes (les dix années les plus chaudes de la vie terrestre connue scientifiquement se situent au cours des quatorze dernières années), des schémas inquiétants (canicules, inondations, montée du niveau de la mer, extinction d'espèces animales, etc.) A travers des diapositives, des dessins et des documents d'archives, c'est l'annonce d'une catastrophe planétaire.
A la fin des années 60 déjà, Al Gore s'était intéressé aux problèmes de l'environnement. Plus tard et en tant que vice-président des Etats-Unis, il a participé à de nombreuses rencontres internationales - Sommet de Rio (1992), Protocole de Kyoto (1997) -, et le moins qu'on puisse dire, c'est qu'il connaît son sujet. Les explications et les chiffres qu'il avance constituent la matière même de ce documentaire militant auquel le réalisateur a su donner un dynamisme de bon aloi, privilégiant les graphiques visuels et laissant l'humour d'Al Gore poindre à bon escient. Un Al Gore qui ne craint pas de dévoiler en cours de route plusieurs pans de sa vie personnelle, révélant des anecdotes surprenantes ou émouvantes.
Le personnage n'est pas du genre à baisser les bras: ""Il ne nous reste que cinq à dix ans pour réagir"", répète-t-il inlassablement. ""Il s'agit de l'avenir de notre planète, et l'affaire est encore gérable."" Pour autant que chacun s'y mette et accepte les changements. UNE VERITE QUI DERANGE relaie ainsi l'action et le combat passionné d'un homme qui rappelle au monde les règles à respecter (voir www.climatecrisis.net), et aux Etats-Unis en particulier la nécessité de ratifier le protocole de Kyoto!
Al Gore, 58 ans, vient de déclarer (selon l'agence AFP) qu'il ne pouvait pas ""complètement"" exclure une nouvelle candidature à la présidence des Etats-Unis... La démarche d'UNE VERITE QUI DERANGE s'inscrira-t-elle dans les priorités démocrates, lors des présidentielles de 2008?
Antoine Rochat"
Ancien membre