Critique
"Après deux films très différents l'un de l'autre, mais également talentueux, VIRGIN SUICIDES en 1999, et LOST IN TRANSLATION en 2003, le nouveau long métrage de Sofia Coppola est une déception. MARIE-ANTOINETTE s'arroge la lourde responsabilité de raconter l'un des grands personnages de l'histoire, celui qui a fait triompher le style rococo comme le signe d'une décadence inéluctable; celui autour duquel, finalement, s'est effondrée la monarchie française.
En 1770, pour servir la politique, Marie-Antoinette (Kirsten Dunst), princesse autrichienne âgée de 15 ans, est mariée au futur roi de France, Louis-Auguste (Jason Schwartzman), 16 ans. Quatre ans plus tard, à la mort du grand-père, Louis XV, elle devient reine de France aux côtés de Louis XVI. Le couple n'a pas d'enfant, le roi délaisse sa reine. Laquelle, lassée par le protocole, s'invente une vie dispendieuse, emplie de fêtes et de costumes, jusqu'à la naissance, enfin, d'une fille, suivie de deux garçons. Pour les Français qui traversent une crise économique sans précédent, Marie-Antoinette devient le symbole des dépenses inconsidérées de la monarchie, l'ennemie du peuple.
L'histoire n'offre qu'une trame légère à Sofia Coppola qui s'attache surtout à illustrer l'intimité d'une femme masquée par le luxe et l'apparat inhérents à sa fonction. ""J'ai préféré montrer que derrière les comportements de façades, les individus qui vivaient au XVIIIe siècle avaient aussi des attitudes atemporelles. J'ai tenté de présenter le côté humain de la reine, ni parfaite, ni innocente, ni aussi mauvaise qu'on l'a dit, mais seulement tombée au mauvais endroit, au mauvais moment et sans un bon attaché de presse.""
Sans doute, mais le public se trouve rapidement dans l'impasse. Certes, il ressent les pressions dont est victime la reine; deux Etats attendent d'elle un héritier. Il comprend l'ennui de cette trop jeune femme qui fuit le poids trop lourd de la politique en se réfugiant dans la nature de Rousseau. Il perçoit même la tragique légèreté du système monarchique qui pose un pouvoir énorme sur des épaules incompétentes, pourvu qu'elles soient aristocrates. Il manque pourtant de la consistance à cette petite histoire appuyée sur la grande, il y manque de la profondeur et du ressort. Car si Sofia Coppola maîtrise la technique et l'esthétique de son film, elle le prive de la réflexion qui en ferait une œuvre."
Geneviève Praplan