Critique
"Une jeune femme, A-Yu, sort de prison, ayant purgé une peine de trois ans (on en connaîtra les raisons plus tard). Déstabilisée, presque muette, elle est prise en charge par Ann, une femme un peu plus âgée qu'elle, qui a aussi connu la prison. Le film de Cheng Wen-tang, souvent émouvant, s'attache aux pas de A-Yu qui essaie de trouver du travail, en même temps qu'elle connaît ses premières désillusions sentimentales. Une histoire simple, sur une certaine jeunesse, ses difficultés d'intégration dans la société et le monde professionnel, et sa solitude. On est sur l'île de Taïwan, mais on pourrait se trouver ailleurs.
Rien de très nouveau ni de très original peut-être dans ce scénario, mais de réelles qualités cinématographiques: jeu sensible et tout intérieur des deux actrices, qualité du regard du cinéaste, alternance réussie des cadrages serrés sur les visages et des plans largement ouverts sur la ville et le port de Taipei.
Cheng Wen-tang explique qu'il voulait simplement raconter une tranche de vie et ""montrer que l'on peut trouver des compagnons de solitude, des êtres capables de nous protéger"". Un film visuellement très beau qui, dans ses dernières séquences, dévoile toute l'immensité du port de la ville, quand le fleuve débouche sur la mer. Le montreur de marionnettes qui s'était installé avec son théâtre sur le quai vient de partir en bateau: on passe alors du ""Blue cha cha"" - la musique qui accompagne le ""blues"" de A-Yu, tout au long du film - au bleu océan, comme une ouverture vers un espoir malgré tout possible."
Antoine Rochat