Three Times

Affiche Three Times
Réalisé par Hou Hsiao Hsien
Pays de production Taïwan
Année 2004
Durée
Genre Drame
Distributeur Océan Films
Acteurs Qi Shu, Chang Chen, Mei Fang, Liao Su-Jen, Di Mei
Age légal 7 ans
Age suggéré 14 ans
N° cinéfeuilles 504
Bande annonce (Allociné)

Critique

"Trois époques, 1911, 1966, 2005, trois histoires incarnées par le même couple de comédiens. ""Ce conte sentimental sur la nostalgie du moment perdu"", selon les termes du réalisateur, évoque la triple réincarnation d'un amour infini. Peut-on y voir aussi une allégorie sur les trois époques-clés de l'histoire de Taiwan? Evoquant des souvenirs personnels, Hou Hsiao Hsien nous laisse une œuvre difficile d'accès, ouverte à diverses interprétations. Il est possible de passer totalement à côté d'un tel film, il est possible aussi de se laisser subjuguer par son aspect poétique.



Georges Blanc





Hou Hsiao Hsien, on le sait, n'a rien d'un cinéaste commercial. Chacun de ses derniers films repose sur un scénario extrêmement ténu: THREE TIMES en est sans doute le meilleur exemple. Avec cette nouvelle variation, en trois temps, sur un thème connu - celui de l'expression des sentiments amoureux - le réalisateur taïwanais ne recherche visiblement pas une bonne place au box-office. Tout au plus la reconnaissance d'un certain public.

Trois rencontres amoureuses, trois moments précis de l'histoire de Formose et de Taïwan, trois manières différentes de raconter chaque fois la même chose ou presque, avec les mêmes acteurs (Shu Qi et Chang Chen). Pour chacun des trois épisodes, Hou Hsiao Hsien adoptera une écriture cinématographique distincte, liée à l'époque en question: celle du cinéma muet et des intertitres pour 1911; celle, plus classique, des longs plans-séquences pour 1966; celle, plus heurtée et chaotique dans son rythme, pour le cinéma d'aujourd'hui. Au travers de cette forme soigneusement élaborée se glisse une subtile évocation de la naissance des sentiments amoureux, dans leur rapport avec le monde extérieur et l'époque.

Trois tableaux différents donc. A Kaohsiung, en 1966, à l'âge de l'adolescence et du service militaire du cinéaste, un moment de l'existence où tout semble encore possible. A Dadaocheng, en 1911, en pleine occupation japonaise, les rendez-vous d'un journaliste révolutionnaire et d'une courtisane. En 2005 enfin, à Taipei, dans la grisaille et la solitude d'une ville moderne, une vie amoureuse qui paraît éclatée et parfois vide de sens.

Le charme de THREE TIMES opère peu à peu, au rythme de la respiration des récits, une respiration qui pourra se prolonger bien au-delà des dernières images. L'intérêt du film - on est aux antipodes d'un cinéma d'action! - se situe à la fois dans ce retour aux racines et à l'histoire du pays, dans ce clin d'œil au cinéma aussi, et dans l'évocation de trois rencontres amoureuses modelées par le temps.

Son regard est celui d'un cinéaste très pudique, très attentif aussi à la beauté de l'image. En trois séquences de 45 minutes, il parle de Taïwan, de son propre monde intérieur et du passage inexorable du temps. Tout a changé, semble-t-il dire dans ces trois tableaux impeccablement filmés et intitulés ""le temps de l'amour"", ""le temps de la liberté"" et ""le temps de la jeunesse"". On aurait pu les appeler aussi les temps de la nostalgie, de l'émotion et du désenchantement.



Antoine Rochat"

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