Critique
"Les parents de Réda (Nicolas Cazalé) ont émigré du Maroc avant sa naissance. Lui est devenu un vrai Français. Au moment où le film le découvre, il est très occupé par la jeune fille qu'il aime et par la préparation de son bac. Voilà que son père (Mohamed Majd) lui ordonne de le conduire en voiture faire son pèlerinage à La Mecque. Le garçon est furieux, mais l'autorité paternelle prévaut. Une fois en route, ils se retrouvent confrontés l'un à l'autre, au fil d'un voyage de plusieurs milliers de kilomètres. Malgré les liens du sang, les antagonismes sont doubles, non seulement les générations mais encore les cultures sont différentes.
""Chacun des deux personnages apprend énormément au cours du voyage, observe le réalisateur, marocain lui aussi. Pour moi, le père et le fils sont comme deux points qui finissent par se rejoindre."" C'est cette approche qu'il dépeint avec sensibilité. Hors des chemins battus par les agences, le voyage place très vite l'individu face à ses limites, c'est tout son intérêt. Réda et son père en font l'expérience. Ils affrontent les aléas d'habitudes et de lieux inconnus, les difficultés les ramènent l'un vers l'autre, ils se découvrent une complémentarité qui redonne à chacun sa valeur. Cette approche de la relation père-fils est sympathique.
Il y en a une autre, celle de la religion musulmane, par le rideau très légèrement soulevé sur son esprit et ses rites, religion le plus souvent mal connue et désormais reléguée derrière sa déviance terroriste. Cet islam-là respecte son voisin, le soutient et lui pardonne. La foi du père est intransigeante, mais elle fait preuve de grandeur. LE GRAND VOYAGE est la première fiction dont une partie du décor est La Mecque et ses pèlerins. C'est une belle ouverture.
Enfin, il y a le voyage avec ses rencontres, ses surprises, ses angoisses. Le vrai voyage au ras du sol qui vit, jour après jour, l'évolution des paysages et ouvre l'esprit sur la multitude de façons de vivre."
Geneviève Praplan
