Critique
"Wim Wenders propose à nouveau un documentaire sur la musique, cette fois le blues est à l'honneur, utilisant un principe proche de celui qui a fait le succès du fameux BUENA VISTA SOCIAL CLUB. Partant de l'histoire d'une petite poignée de bluesmen de la fin des années 20, dont il retrace le parcours, il les remet au goût du jour pour nous les faire redécouvrir, à travers l'interprétation de ces classiques par des musiciens actuels comme Beck, Cassandra Wilson, Lou Reed...
Il évite le didactisme et l'explicatif en donnant la parole à un vieux musicien, interprété par un jeune acteur, ce qui rend le film plus attractif qu'une accumulation d'images d'archives. Les extraits musicaux s'enchaînent, laissant un peu d'espace à des documents d'époque, de rares interviews et des reconstitutions. Ce savant mélange donne presque l'impression de ne pas voir un documentaire, mais une affabulation sur des personnages imaginaires, d'autant que ceux-ci paraissent haut en couleur. Un film qui devrait plaire à tous les amateurs de blues et plus. La bande originale du film devrait aussi rencontrer un certain succès.
Ivan Corbisier
Après le succès de BUENA VISTA SOCIAL CLUB, film consacré à un groupe de musiciens cubains, Wim Wenders remonte aux sources du blues, en s'attachant à trois de ses artistes préférés, Skip James, Blind Willie Johnson et J. B. Lenoir. Entre fiction et séquences documentaires, images rares d'archives et témoignages d'aujourd'hui, le cinéaste allemand entraîne le spectateur dans le temps et l'espace. THE SOUL OF A MAN, annoncé comme le premier d'une série de sept films consacrés au blues, sera suivi par d'autres longs métrages de Martin Scorsese, Clint Eastwood, Mike Figgis, etc.
Dans ce pèlerinage aux sources, Wenders adopte une démarche intéressante, même si le film est peut-être moins séduisant que celui consacré aux légendaires musiciens de Cuba. Ne disposant pas d'archives filmées sur les trois chanteurs - qui ont vécu dans les années 30 - le cinéaste a décidé d'en reconstituer une partie, dans une sorte de fiction-documentaire en noir et blanc (en s'efforçant même de retrouver le ""grain"" des images des films muets du début du siècle). Il y a ensuite inséré des enregistrements de l'époque, en choisissant souvent de confronter la première version musicale (avec ses inévitables défauts techniques) à celle d'un chanteur ou d'un groupe actuel. Cette mise en parallèle de styles musicaux différents permet des allers et retours dans le temps, en même temps qu'elle donne au cinéaste l'occasion de parler de la vie des Noirs dans les années 30, des conflits raciaux et des luttes politiques du milieu du XXe siècle (on croisera ainsi Martin Luther King).
Se présentant comme une reconstitution d'époque, subtile et particulièrement bien documentée, THE SOUL OF A MAN s'adresse avant tout à qui aime le blues, à qui est sensible à l'émotion, à la puissance et au rythme d'une musique qui a fortement influencé, on le sait, celle d'aujourd'hui. THE SOUL OF A MAN est un film-poème remontant aux sources du jazz, à travers l'évocation de trois voix et de trois existences. On sent Wenders passionné par cette musique.
Antoine Rochat"
Ancien membre
