Zatoichi

Affiche Zatoichi
Réalisé par Takeshi Kitano
Pays de production Japon
Année 2003
Durée
Musique Keiichi Suzuki
Genre Aventure, Action
Distributeur Bac Films
Acteurs Takeshi Kitano, Tadanobu Asano, Michiyo Ogusu, Yui Natsukawa, Guadalcanal Taka
Age légal 14 ans
Age suggéré 14 ans
N° cinéfeuilles 469
Bande annonce (Allociné)

Critique

"Dans tous les films de Takeshi Kitano - quels que soient les genres visités - on retrouve la patte du réalisateur de HANA-BI (polar tendre et violent), de L'ETE DE KIKUJIRO (petit chef-d'œuvre burlesque et sensible) et de DOLLS (œuvre contemplative, picturale et proche du théâtre de marionnettes). Violence, burlesque, qualité plastique de l'image sont donc au rendez-vous.

Takeshi Kitano se lance ici dans le film d'époque, de costumes et de sabres. Le scénario s'inspire d'un personnage légendaire très connu au Japon, Zatoichi, qui a été l'objet de plusieurs adaptations au cinéma et à la télévision entre 1960 et 1990. Un personnage héroïque que Kitano va radicalement transformer en un masseur aveugle, un spécialiste des jeux de tripots et... un sabreur hors du commun. Et c'est Kitano lui-même qui interprète Zatoichi, samouraï énigmatique, peu loquace, mais stupéfiant de précision et impitoyablement efficace lorsqu'il manie sa canne-épée rouge-sang.

Traversant la campagne, Zatoichi découvre une petite ville gangrenée par les luttes sanglantes que se livrent divers groupes de samouraïs. Il rencontrera deux jeunes geishas, Okinu et sa sœur (en fait son frère) Osei, bien décidées à retrouver les traces du meurtrier de leur père. Peu importe d'ailleurs l'histoire, compliquée à souhait par moments: ZATOICHI est avant tout un film d'atmosphère faite d'angoisse et de suspense, où la violence éclate brutalement, sèche - la mort est quasi instantanée - et inattendue, où l'on passe d'un règlement de compte à l'autre. Beaucoup (trop) de morts donc, et peu de personnages véritablement sympathiques (même si tous les acteurs sont excellents), la règle étant que chacun doit, s'il veut sauver sa peau, sacrifier celle des autres...

Reste - pour ceux qui supportent les coups de sabres et la vue du sang - une histoire racontée avec talent: un montage sans faille, des ellipses subtiles, une dynamique maîtrisée et une imagination de tous les instants, bref un film plein de surprises et d'inventions. Dont celle d'accompagner certaines séquences d'une bande musicale décalée, à laquelle les protagonistes semblent adapter leurs gestes, suivant ce rythme venu d'ailleurs, dans une sorte de chorégraphie imprévue qui touche au burlesque. Dont celle aussi de mettre un terme à toutes ces luttes sanglantes par deux ou trois pirouettes finales (on ne les révélera pas) qui permettent de prendre quelque distance avec cette (trop) longue tuerie. Derniers clins d'œil d'un cinéaste qui nous rappelle qu'on est au cinéma, qu'il s'agit d'un divertissement et que ZATOICHI est avant tout un brillant exercice de style. Avec, sous-jacent dans son propos, un certain détachement mêlé d'amertume: ""Même avec les yeux grands ouverts, avoue Zatoichi, je n'y vois rien..."""

Antoine Rochat