Chansons du deuxième étage

Affiche Chansons du deuxième étage
Réalisé par Roy Andersson
Pays de production Suède, Norvège, Danemark
Année 2000
Durée
Musique Benny Andersson
Genre Comédie, Drame
Distributeur ARP Sélection
Acteurs Hanna Eriksson, Lars Norsh, Lucio Vucino, Sten Andersson, Stefan Larsson
Age légal 14 ans
Age suggéré 16 ans
N° cinéfeuilles 394
Bande annonce (Allociné)

Critique

Réalisateur de nombreux films publicitaires, Roy Andersson tourne sans synopsis, ni plan de tournage, ni comédiens professionnels, et s'adonne avec délices aux plans-séquences. Il affectionne les scènes burlesques et surréalistes et, en la matière, le spectateur est servi avec un film iconoclaste et proche du style Hara-Kiri. Dans une atmosphère de fin du monde, tout passe à la moulinette, les sujets les plus sensibles sont décapés.

Cette oeuvre corrosive est cependant de nature à susciter un intéressant débat au coeur d'un cercle de cinéphiles chrétiens avertis.

La musique, composée à partir du montage final, mérite une mention: elle est en parfaite adéquation avec le film.



Daniel Grivel





Voici une œuvre hors du commun et qui, par là même, échappe totalement aux cri­tères habituels de l’approche critique. Il n’y a pas d’histoire proprement dite, le réalisateur se contentant de mettre côte à côte une multitude de personnages en butte aux aléas de l’existence ou en quête d’un sens à donner à leur vie. Le seul fil conducteur est à chercher du côté du poids de la misère du monde, et si certains ont reçu ce film comme «un hilarant conte moral sur notre fin de siècle», c’est, me semble-t-il, avant tout de profond désespoir dont il est question dans cette allégorie. Mais jugez-en plutôt.

Un employé modèle se traîne aux pieds du patron qui vient de le licencier. Un passant égaré est passé à tabac devant une foule impassible. Un prestidigitateur rate son numéro de l’homme coupé en deux et lui enfonce sa scie dans le ventre. Un chef d’entreprise s’accuse d’avoir mis le feu à son usine. Un marchand de crucifix finit par jeter ses invendus dans un terrain vague. En quelques scènes grinçantes de cet acabit, le ton du film est ainsi donné. Dans une atmosphère de fin du monde, les sujets les plus divers et les plus sensibles sont décapés de cette manière.

Présentée en compétition à Cannes l’an­née dernière, cette œuvre a eu pour certains le poids d’une Palme d’or. Il est vrai que cette allégorie est d’une très grande richesse visuelle et qu’elle offre quantité de pistes de réflexion. Mais elle peut aussi très vite lasser ou paraître prétentieuse. Il n’en reste pas moins que quelques scè­nes demeureront gravées dans notre mémoire. Ainsi lorsqu’au milieu du terrain vague où s’amoncellent les crucifix s’avance une cohorte de gens vêtus de noir entourant une fillette habillée en blanc, on ne peut s’empêcher de penser au matin de Pâques succédant à la nuit de Vendredi-Saint, mais le bandeau que l’on découvre après coup sur les yeux de la fillette est de nature à enlever toutes nos illusions. Sans aucun doute, cette œuvre fera date dans l’histoire du cinéma.



Georges Blanc

Ancien membre