Social Distance

Le 18 novembre 2020

De Hilary Weisman Graham et Jenji Kohan, USA, 2020, Diffusion Netflix

Avec : L.J. Foley, David Iacono, Aidan Foley

Scénario : Tara Herrmann, Anthony Natoli, Hilary Weisman Graham, Brandon S. Martinez, Heather Jeng Bladt

Saison 1 : 8 épisodes de 20 minutes

Genre : Comédie dramatique

Âge : 16/16

NOTE : 18


Cette première série sur le confinement a le mérite de faire réfléchir différemment à cette période étrange que nous vivons. La mise en scène des dispositifs actuels de communication numériques est très réussie, tout comme la démonstration de leurs limites…

Huit épisodes de vingt minutes portraitisent des gens comme vous et moi, dans la période du premier confinement, aussi perdus que créatifs pour combattre l’ennui et la peur. La série de deux réalisatrices américaines, qui avaient aussi travaillé sur Orange Is The New Black notamment, réunit des acteurs et actrices d’autres séries dans un pêle-mêle de questions: vivre un confinement en 2020, ça veut dire quoi? Comment par exemple faire comprendre à un enfant de 5 ans qu’il ne peut pas voir sa maman car elle est très malade et contagieuse? En lui racontant l’histoire de la grande malédiction, portée par le vent, qui peut seulement être évitée en restant à l’intérieur! Comment palier à la solitude inhérente à une récente rupture amoureuse? En se mettant en scène sur Instagram avec une plante verte, telle une compagne parfaite, Ike vit ses journées au rythme de likes et commentaires haineux, entre les réunions en ligne d’alcooliques anonymes. Et comment rendre un dernier hommage à ceux qui viennent de quitter ce monde? Organiser un enterrement via Zoom, ce n’est clairement pas de tout repos, mais cela crée des situations aussi dramatiques que cocasses.

Tous ces événements qui, il y a quelques mois, nous semblaient habituels, quotidiens, prennent tout à coup une autre dimension. Littéralement même, lorsqu’au lieu de vraies personnes on se retrouve à passer sa journée devant des écrans, visages aplatis, absence de mobilisation des autres sens que la vue. La créativité des réalisatrices apparaît alors avec brio, car elles réussissent à montrer différentes manières de voir, de regarder, et pas seulement via l’utilisation de différentes applications de vidéoconférence. L’esthétique qui aurait pu être lassante s’avère davantage un miroir de nos usages numériques dans des buts sociaux et culturels. Enfin, elle ne tombe pas dans le piège de la dénonciation critique ou de la répétition inintéressante.

Ainsi, nos habitudes sociales, nos manières d’interagir en couple, en famille, au travail, mais aussi avec nous-mêmes, sont reflétées dans cette excellente première production sur ce sujet du confinement. Ces personnages n’ont peut-être rien en commun mais sont étrangement réunis par l’incertitude face à la pandémie. La série n’aurait pu mieux finir qu’en s’inscrivant dans l’actualité avec le décès violent de George Floyd en mai. Un jeune garçon noir refuse d’aller travailler pour pouvoir descendre dans la rue manifester avec ses pairs; il aura le dernier mot de la série face à une génération qui luttait à son époque autrement pour obtenir des droits, génération à laquelle il déclare: «You can rest now».


Camille Mottier