There will be blood

Affiche There will be blood
Réalisé par Paul Thomas Anderson
Pays de production U.S.A.
Année 2007
Durée
Musique Jonny Greenwood
Genre Drame
Distributeur Walt Disney Studios Motion Pictures France
Acteurs Kevin J. O'Connor, Paul Dano, Daniel Day-Lewis, Dillon Freasier, Russell Harvard
Age légal 14 ans
Age suggéré 14 ans
N° cinéfeuilles 564
Bande annonce (Allociné)

Critique

Œuvre âpre, dure et profonde, ce destin d’un prospecteur déploie l’âme humaine à la manière d’un grand récit de l’Ancien Testament.

L’histoire se résume à fort peu. Un prospecteur de pétrole flaire le filon lorsqu’il entend parler d’un coin de Californie où la terre serait presque souillée par l’or noir. Il achète les droits d’exploitation, et le rêve américain peut alors se déployer: il est possible de partir de rien et devenir richissime. Enfin, pour un temps, jusqu’à ce que le rêve prenne des allures de cauchemar. L’exploitant Daniel Plainview (Daniel Day-Lewis) est habile, il sait convaincre, même les plus réticents, n’hésitant pas à utiliser pour cela son joker, à savoir l’enfant qu’il a recueilli, H.W. (Dillon Freasier), fils d’un terrassier tué lors d’un forage.

Cette histoire est tirée d’un roman de Upton Sinclar, Oil, paru en 1927, et inspirée par les destins d’un Rockefeller ou d’un Edward Doheny qui, au début du siècle dernier, fit creuser 500 puits et en cinq ans devint l’une des fortunes les plus considérables des Etats-Unis.

Ce qui retient l’attention, c’est que le cinéaste montre mais n’explique pas, préférant respecter le mystère (et la noirceur) des êtres. A cet égard, les premiers plans énoncent l’essentiel, quasi sans paroles, dureté du paysage et de l’effort humain, dureté qui cache la richesse, mais qui cache aussi une source qui jaillira, mais noire, trouble symbolique.

Aussi, en multipliant les allers et retours entre l’histoire particulière dudit prospecteur et celle, plus large de la communauté humaine, et notamment religieuse, où il évolue, une pulsation se fait progressivement entendre, où les meilleurs et les pires sentiments paraissent alterner. Mais qu’est-ce qui met en mouvement Daniel Plainview? D’où sort cette énergie dévastatrice qui semble infinie? Quelles relations H.W. a-t-il tissé avec ce père adoptif? Les convictions religieuses s’effaceront-elles face à tout ce que paraît offrir l’argent désormais à portée? La cupidité sera-t-elle entravée par l’idéalisme spirituel (débridé) ou, inversement, le prêcheur charismatique sera-t-il capable de résister à un self-made-man que rien ne paraît pouvoir arrêter? Les questions se succèdent et trouvent tout à la fois leur paroxysme et peut-être un début de réponse lorsqu’apparaît, inattendu, Henry, un personnage qui se prétend le demi-frère de Plainview. L’est-il vraiment? Quoi qu’il en soit, il révélera à sa façon que le pétrole qui sourd du cœur de la terre ressemble parfois à s’y tromper à ce qui monte du cœur d’un être.

Grâce à une utilisation habile de la musique et par d’âpres décors qui mettent à nu l’âme humaine, le réalisateur de MAGNOLIA (1999) et de IVRE D’AMOUR (2002) écarte toute séduction pour aller à l’essentiel. Il y réussit avec la complicité de Daniel Day-Lewis qui campe d’éblouissante manière Plainview, dont on dirait qu’il est «possédé», jusqu’à en trahir la moindre faille.

Serge Molla