Jindabyne

Affiche Jindabyne
Réalisé par Ray Lawrence
Pays de production Australie
Année 2006
Durée
Musique Paul Kelly (III)
Genre Drame
Distributeur La Fabrique de Films
Acteurs Gabriel Byrne, Laura Linney, Deborra-Lee Furness, John Howard, Leah Purcell
Age légal 14 ans
Age suggéré 16 ans
N° cinéfeuilles 526
Bande annonce (Allociné)

Critique

"Troisième film de Ray Lawrence - on se souvient de son excellent LANTANA (2001) - JINDABYNE est une adaptation d'une nouvelle de l'écrivain américain R. Carver. Robert Altman s'en était déjà inspiré en 1992 pour un épisode de SHORT CUTS.

Dans le film de Lawrence, quatre pêcheurs découvrent le corps d'une femme noyée, mais ne signalent leur macabre découverte que quelques jours plus tard. Trop tardivement pour que l'affaire passe comme ça. Ils sont dès lors confrontés à l'incompréhension, à la suspicion, puis à la colère des habitants de la petite localité où ils vivent. Cela d'autant plus que la victime est d'origine aborigène: des relents de racisme se font jour, des représailles ont lieu. L'événement ira jusqu'à remettre en cause l'équilibre même des quatre couples concernés, révélant une forte opposition des points de vue entre hommes et femmes.

JINDABYNE est une approche délicate de personnages qui ont des choses cachées au fond d'eux-mêmes, qu'il s'agisse de quelqu'un qui a disparu, d'un passé qu'on aimerait changer, d'une personne qu'on aurait aimé être ou d'un événement devant lequel on se sent impuissant. Le cinéaste aborde aussi des questions d'ordre éthique, de responsabilité personnelle ou collective, laissant entendre que la sincérité vis-à-vis de soi-même et des autres, conjuguée avec l'aide de gens sur lesquels on peut compter, permet de mieux surmonter les difficultés.

Le cinéaste traite le sujet avec finesse, entremêlant les trajectoires des personnages, y ajoutant des intrigues secondaires qui jouent le rôle de miroirs réfléchissants, au risque de ralentir parfois, c'est vrai, la progression du récit. Des secrets enfouis chez les protagonistes vont remonter à la surface, comme réapparaît tout à coup la pointe de l'église de JINDABYNE, dans l'eau du barrage qui a englouti la ville.

Réalisateur talentueux - mais peu prolifique -, Ray Lawrence porte un regard attentif sur chacun de ses personnages, faisant fi du suspense - le spectateur sait dès les premières images ce qui s'est réellement passé - et s'attachant aux détails de chaque existence, aux petits gestes, aux silences auxquels il sait donner un sens.

Le film du cinéaste australien - présenté dans le cadre de la Quinzaine des réalisateurs - est sans doute l'un des meilleurs présentés cette année au Festival de Cannes, d'une qualité largement supérieure à celle d'autres films retenus en Sélection officielle. L'interprétation de tous les acteurs - Laura Linney. Gabriel Byrne et Deborra-lee Furness en tête - est remarquable.



Antoine Rochat





D'entrée de jeu, le spectateur est dépaysé: ciel immense, paysage aride ponctué d'énormes blocs de rocher aux contours évoquant des statues de Henry Moore. Au sommet d'une colline, littéralement embusqué derrière un rempart naturel, un pick-up occupé par un guetteur muni de jumelles, comparable à un oiseau de proie. A l'arrière-plan, une voiture approche, qui sera pistée par le prédateur.

D'entrée de jeu, on perçoit qu'il y a du drame dans l'air. Par glissades successives, le troisième film de Ray Lawrence (LANTANA) renforcera cette intuition.

D'entrée de jeu, une bande de copains se réjouissant de sa partie annuelle de pêche à la mouche décide de faire comme si l'un d'eux n'avait pas découvert le cadavre d'une jeune femme dans leur rivière préférée. La police ne sera alertée que les truites une fois pêchées.

D'entrée de jeu, autorités et population, y compris la communauté aborigène dont faisait partie la victime, veulent voir les choses en face et les tirer au clair.

Mais tout cela n'est pas si simple...

Les acteurs sont excellents. L'ambiance trouble n'est pas sans rappeler celle de THE PLEDGE, et Dürrenmatt n'est peut-être pas si éloigné de cette histoire de choc des cultures, de criminel anonyme, de villageois chamboulés par le comportement de quelques-uns d'entre eux, et d'une femme seule contre tous.

Décidément, les films des antipodes ont souvent, pour reprendre un slogan publicitaire, ""un goût sauvage venu d'ailleurs""...



Daniel Grivel"

Ancien membre