L'édito de Serge Molla - Œuvre ou produit?

Le 07 septembre 2011

Les images sont au fond de toutes les mémoires. Elles ont tout du film de genre. Deux avions s’encastrent dans les deux plus célèbres gratte-ciel du monde, le World Trade Center de New York. Nombreux sont ceux qui croient alors, l’espace de quelques instants, découvrir le lancement d’un nouveau produit catastrophe d’Hollywood.

Le 11 septembre 2001, il n’en était rien. Ce jour-là, la réalité dépassait la fiction. L’inimaginable se produisait et, médusé, chacun captait des images qui ne quitteraient plus sa mémoire. Et alors que les Etats-Unis partaient en guerre, Hollywood récupérait la tragédie et produisait des films spécifiquement sur ce sujet (WORLD TRADE CENTER; VOL 93), multipliant les allusions dans nombre d’autres.

Il y a quelques mois, en plein Festival de Cannes, «l’affaire DSK» fait la une du monde entier ou presque. Récemment, l’affaire se complète, mais quelques chapitres restent encore à écrire. Cette fois-ci, ce sont moins les images indélébiles que le scénario qui imprime sa marque. Et nul doute qu’après une première reprise de cette affaire dans la série New York Unité Spéciale avec Franco Nero pour incarner l’ancien patron du Fonds monétaire international, les scénaristes sont au travail, mais attendent le dénouement final pour lancer le tournage. Au programme, voilà un sujet qui comporte tout ce qu’il faut pour rapporter gros. Pensez: l’un des hommes blancs les plus puissants de la planète face à la pauvre femme de chambre noire. Magnifiques affrontements où vont se déchaîner pouvoir et sexe, finance et pauvreté, vérités et mensonges, et cela avec l’appui de l’épouse exemplaire et du mafieux véreux, sans oublier l’efficace coopération du juge, du procureur, des avocats et des agents de la police new-yorkaise. Le scénario à rebondissements ne manquera pas de vous étonner, il sidère déjà.

Pourtant, le véritable cinéma n’est pas qu’une juxtaposition d’images fortes, fussent-elles documentaires, ou l’expression d’un habile scénario, fût-il inspiré de la grande histoire ou de faits divers. L’une et l’autre sont utiles, certes, mais en fait elles ne sont rien sans le regard particulier d’un cinéaste qu’ici nous tentons de repérer.

D’ailleurs, «King Vidor déclarait: le cinéma est le plus fabuleux moyen d’expression jamais inventé, mais en raison de sa puissance même d’illusion, on ne doit le confier qu’à des magiciens et à des sorciers capables de lui donner vie» (Martin Scorcese).

Serge Molla (CF 642)