L'édito de Daniel Grivel - Grands écarts...

Le 09 octobre 2013

On constate souvent une distance importante entre les avis des «spécialistes» et l'opinion publique, et les experts sont souvent les premiers à s'en offusquer.Il n'y a qu'à prendre acte, par exemple, du silence assourdissant par lequel les médias ont accueilli la défaite du Groupement pour une Suisse sans armée...

Comment?! le bon peuple a donc eu le front de ne pas suivre les prescriptions prodiguées sur le papier journal et sur les ondes?...

Il en va de même dans le domaine culturel: s'agissant des arts visuels, le profane peine souvent à s'extasier devant des oeuvres absconses ou provocatrices, à moins de craindre de passer pour un Béotien ou d'être épaté par les prix surfaits auxquels sont vendus des objets tout aussi surfaits... Et si par aventure on lit la critique d'un concert (genre qui se raréfie de plus en plus de nos jours), on se demande parfois si l'on a assisté au même événement que le plumitif de service.
Quid du cinéma? Intéressons-nous au box office romand au 1er octobre, tout en tenant du compte du fait que les conditions météorologiques de ces dernières semaines n'ont guère favorisé la fréquentation des salles obscures. Saluons le départ en fanfare de Blue Jasmine : 11'515 spectateurs en une semaine sur 12 écrans. Décidément, Woody Allen a ses fidèles, et il semble que le bouche-à-oreille fonctionne à merveille. En ce qui concerne Ciné-Feuilles, il y a adéquation entre la critique et le public, comme pour Le Majordome, honorablement placé après trois semaines. Laissons de côté un certain nombre de blockbusters, la plupart d'entre eux se sont ramassés, malgré le tapage promotionnel. Les enfants représentent un marché intéressant: étirés sur de longues semaines, Les Schtroumpfs 2 et Moi, moche et méchant 2 représentent une bonne petite rente, si on y ajoute sucreries et sodas... Parmi les films que nous avons plutôt aimés et qui «tirent la langue», il faut signaler La Grande Bellezza, Jeune et jolie, Gabrielle, Elle s'en va, Les Grandes ondes et Sur le chemin de l'école. Mais nous ne pleurerons pas sur la disparition de L'Inconnu du lac...
Grands écarts donc entre critiques et public, mais aussi convergences: nous sommes dans un domaine où la subjectivité est reine et où les réactions personnelles ne peuvent être réduites à des équations.
Au bout du compte, il serait possible de se rallier à Jules Renard qui déclarait: «Je ne sais pas si j'ai du goût, mais j'ai le dégoût très sûr.»

Daniel Grivel