L'édito de Serge Molla - Cinéma, liberté et pop-corn

Le 30 novembre 2011

Dans son ouvrage La critique de cinéma (2008), Jean-Michel Frodon, directeur de la rédaction des Cahiers du cinéma, parle du métier si particulier de critique de cinéma. Pratique journalistique, exercice littéraire, approche cinéphile, engagement personnel forcément subjectif, le métier de critique est au croisement de plusieurs démarches.

Pour moi, le critique est avant tout un donneur d’envie qui propose sa lecture des films qu’il a vus avant tout le monde. Il assume ses choix, ses réticences, ses mouvements d’humeur et met en garde contre ce qu’il considère comme un film sans intérêt. Il sert aussi de pare-feu au marketing lié à la promotion des grosses productions. A condition bien sûr qu’il ne cède pas aux sirènes des attachés de presse et des promoteurs des distributeurs de films qui le courtisent. Car, comme Jean-Michel Frodon le rappelle, différentes pressions pèsent sur ceux qui sont chargés de rédiger des critiques de films: dossiers de presse, DVD promotionnels, invitations et cadeaux divers, parmi lesquels le critique doit faire un tri pour trouver des éléments qui seront pour lui de véritables outils de travail.

A Ciné-Feuilles, le risque, à vrai dire, est bien maigre, ce qui donne aux chroniqueurs de la revue une très précieuse liberté dans leurs appréciations. Pas besoin pour eux de renvoyer l’ascenseur, de se sentir redevables de quelque faveur, hormis celle de pouvoir assister à des projections dans les meilleures conditions possibles et avant tout le monde. Un privilège que j’ai rétrospectivement apprécié, après avoir été voir un film pour enfants avec mon petit-fils, un dimanche après-midi. J’y ai subi la fringale de pop-corn d’une grande partie des spectateurs, qui n’arrêtèrent pas de fourrager dans leurs immenses gobelets et de se gaver pendant toute la projection du film.

Le silence et la tranquillité des projections de presse sont effectivement un privilège qui permet de se relier à ses émotions sans parasitages extérieurs.

Nicole Métral (CF 648)