L'édito de Sabrina Schwob - Cinéma et protagonistes entravés?
Le 09 septembre 2020
La crise sanitaire, encore elle, nous contraint, non sans plaisir, à porter notre regard sur les événements locaux plutôt que sur la Mostra de Venise, premier grand festival à lancer son édition en présentiel depuis ces six derniers mois.
Tournons-le alors vers des actualités cinématographiques lausannoises, qui saisissent le cinéma à travers ses relations avec d’autres arts. En effet, une exposition est proposée à la Fondation de l’Hermitage sur l’influence réciproque entre les arts plastiques et le cinéma - des premiers films jusqu’à la Nouvelle Vague. Un festival également, le premier à Lausanne depuis mars: le Tourne-Films Festival (TFFL), qui se déroule du 9 au 13 septembre. Explorant les liens entre musique et cinéma, il propose une compétition officielle de courts métrages et de clips musicaux, donnant ainsi ses lettres de noblesse à un format généralement peu considéré. Mais c’est autour de la rétrospective surtout que gravite le festival. Cette deuxième édition porte à l’écran le Band Movies, genre ayant pour protagonistes des groupes de musique, réels ou fictifs. Ainsi du classique Certains l’aiment chaud à Almost Famous en passant par A peine j’ouvre les yeux, programmé par le Festival cinémas d’Afrique, un panel varié du genre se déploie entre le parc de Mont-Repos et le Casino de Montbenon. Ce dernier film met en scène la vision d’une jeunesse tunisienne oppressée par un système politique répressif.
Cette représentation d’une jeunesse opprimée par des contraintes extérieures s’observe également dans certains films à l’affiche. Dans Notre-Dame du Nil, le politique s’immisce violemment dans les rapports entre des jeunes filles pensionnaires d’un institut catholique, que leur origine ethnique (tutsi ou hutu) divise. Dans Baracoa, deux adolescents de Cuba - auxquels la caméra s’attache fortement, au point de relayer hors champ l’environnement -, subissent la pression des contraintes sociales qui entrave leur développement. Dans la nouvelle adaptation de The Personal History Of David Copperfield comme dans Les Enfants du Platzspitz, c’est une oppression familiale qui conditionne l’avenir des enfants, le beau-père de David dans le premier cas, une mère toxicomane dans le second, les forçant chacun à évoluer dans un univers marginal et cruel.
Pourtant ces contraintes, comme celles qui s’imposent à l’industrie du cinéma depuis le début de la crise sanitaire, invitent les protagonistes à évoluer dans cette situation, tout comme le cinéma poursuit son chemin, et continue de se mêler à différents arts, adoptant ainsi des formes marginales lorsqu’il n’est pas projeté en dehors des salles obscures.