M

Affiche M
Réalisé par Sara Forestier
Pays de production France
Année 2017
Durée
Genre Drame romantique
Distributeur jmhdistributions
Acteurs Jean-Pierre Léaud, Sara Forestier, Redouanne Harjane, Liv Andren
Age légal 10 ans
Age suggéré 14 ans
N° cinéfeuilles 780

Critique

Ce n’est pas un secret, depuis L’Esquive d’Abdellatif Kechiche (2003), le film qui l’avait révélée à l’âge de 17 ans, Sara Forestier a fait du chemin. Alors déjà remarquable, elle a enchaîné depuis les projets particuliers, décalés, exigeants. Mais cette fois-ci, c’est dans les rôles combinés de réalisatrice, scénariste et actrice qu’elle nous revient. Une première que l’on sent imprégnée d’émotion personnelle, en plus d’une jolie maîtrise.

M, c’est une histoire d’amour. Peut-être d’abord entre Mo (Redouanne Harjane) et Lila (Sara Forestier), deux êtres d’horizons opposés que le hasard met en présence l’un de l’autre. Mais surtout, avec les mots. Elle est bègue mais écrit des poèmes, des bribes de vie comme elle respire. Lui ne sait pas lire et le tait. Et pourtant, ils se trouvent et se créent un monde à eux, où ils peuvent s’ouvrir et être sans honte. Un monde incarné par le mobile home de Mo, entouré seulement par le ciel et le béton déserté.

Si les choses finissent par se distordre, ce n’est pas à cause des courses de voiture secrètes de Mo, ni du père oppressant de Lila, à qui il délègue la charge d’élever sa petite sœur. Non, ce seront justement les mots, la parole, qui vont dresser des barrières. C’est là toute l’intelligence de Sara Forestier, de s’écarter des règles du genre romantique, où les obstacles surgissent toujours de l’extérieur, pour réveiller les faiblesses des personnages. Ici, ces dernières sont tout ; il s’agit dès lors pour nos héros de réussir à les dépasser. Et si leurs cadres de vie ont leur importance, c’est parce qu’ils nous permettent de comprendre d’où viennent ces deux oiseaux quelque peu boitillants. L’injonction à être un homme, le mépris pour la différence, l’absence d’amour : tant de blessures à retracer, à exprimer. Alors, peu à peu, silences, discours, cris et écrits se détachent, mettant à vif les sentiments de Lila et Mo. La réalisatrice va jusqu’à inscrire parfois à même l’écran ces mots (le rapprochement avec le nom du personnage masculin n’est pas anodin), dont il est parfois si difficile de partager le sens, même lorsqu’on s’aime.

Tout cela serait déjà beaucoup, si le visage des deux amants, et tout particulièrement celui de Lila, vibrant de toutes ces émotions informulées, ne touchait pas en plein cœur. A embrasser son sujet à bras le corps, comme dans une lutte, Sara Forestier nous fait plonger avec elle, avec eux. Et nous donne envie d’y croire.

Adèle Morerod

Appréciations

Nom Notes
Adèle Morerod 16