Mother !

Les premiers plans sont magnifiques : après un visage et des flammes, on pénètre silencieusement ou presque dans une grande maison campagnarde et retirée, s’arrête sur un objet particulier, se déplace ailleurs… Une mise en scène parfaite s’installe un climat très étrange, dont on ne sait que penser. Puis une jeune femme (Jennifer Lawrence) se réveille, cherche son compagnon (Javier Bardem), écrivain, le trouve au rez-de-chaussée. Quelle direction le film va-t-il prendre ?  Difficile de répondre à cette question, car la caméra subjective adopte le point de vue la jeune femme qui ressent, s’angoisse, attend, espère, étouffe… Surviennent des invités surprise, à commencer par un couple étrange (Ed Harris, Michelle Pfeiffer), qui vont bien vite bouleverser le calma apparent qui sied à un couple enamouré dont lui est écrivain. Ainsi, progressivement tout bascule et ce qui n’était jusque-là que suggéré capte les images et les sons. La quiétude disparaît, tout glisse imperceptiblement vers le fantastique et l’horreur…

Elle est enceinte, est-ce au dépend de sa création littéraire à lui ? Ou est-ce l’inverse ? Dès lors, la logique n’a plus cours, la réalité devient fiction ou la fiction réalité. C’est dire que le réalisateur de Black Swan et Noé  déroute volontairement avec un grand souci esthétique. Hélas, tout ce qui n’était que suggestion s’est mué en grotesque, saupoudré de symboles et de rites plus ou moins religieux.  Et l’on glisse encore, pour ne pas dire dérape… jusqu’au réveil du cauchemar. Mais en était-ce véritablement un ou alors… ?
Lion d’or, Grand Prix du Jury de la Mostra de Venise