Train de sel et sucre (Le)

Affiche Train de sel et sucre (Le)
Réalisé par Licínio Azevedo
Titre original The Train of Salt and Sugar
Pays de production Portugal, France, Brésil, Afrique du Sud, Mozambique
Année 2016
Durée
Genre Aventure
Distributeur trigonfilm
Acteurs Thiago Justino, Matamba Joaquim, Mário Mabjaia
Age légal 16 ans
Age suggéré 16 ans
N° cinéfeuilles 771

Critique

Un train traverse le nord du Mozambique, en pleine guerre civile, en 1989. Le cinéaste Licínio Azevedo choisit la fiction pour raconter la dure réalité de la vie de ses compatriotes à cette époque-là : des images fortes des difficultés du pays entre 1976 et 1992.

Ancienne possession portugaise devenue indépendante en 1975, le Mozambique connaît au début des années 80 une recrudescence de la lutte intestine opposant le FRELIMO communiste (Front de libération du Mozambique) et la RENAMO (Résistance nationale du Mozambique). C’est en 1989 que le journaliste, écrivain et cinéaste mozambicain Licínio Azevedo a placé son récit qui tient à la fois du document historique et de la fiction.

Un train de marchandises de treize wagons ouverts part de Nampula (nord-est du pays) pour rejoindre le Malawi, à 700 km à l’ouest. Un voyage dans des régions magnifiques et souvent désertiques, mais un voyage risqué, au travers de plusieurs zones rebelles. Un train qui transporte du matériel - il faut constamment s’attendre, en cours de route, à des travaux de remise en état de la voie, les rails ayant été sabotés ou arrachés. Un convoi qui transporte aussi beaucoup de passagères qui s’en vont vendre des sacs de sel (provenant du littoral mozambicain) au Malawi voisin : avec l’argent ainsi gagné elles achèteront des sacs de sucre qu’elles revendront au retour dans leur pays (cette denrée a en effet complètement disparu du Mozambique ruiné par la guerre). Le voyage que ces femmes accomplissent sera souvent interrompu par des attaques de rebelles et va durer plusieurs semaines, avec les difficultés de ravitaillement qu’on peut imaginer.
Sur ce trajet plein d’imprévus se greffent plusieurs histoires personnalisées : celle de Mariamu, une marchande, celle de Rosa, qui vient d’obtenir son diplôme d’infirmière et s’en va rejoindre l’hôpital où elle est engagée, celles des soldats et commandants de l’escorte militaire du convoi, en particulier celle du lieutenant Taiar, formé en Ukraine, ou celle encore, saupoudrée d’un peu de magie, de Sete Maneiras, le chef responsable de la bonne marche du train.

Le film a été tourné sur une ligne de chemin de fer qui existe encore, mais dans le sud du pays (le nord s’est beaucoup transformé et modernisé), avec du matériel ferroviaire «authentique» (il a fallu réparer les machines et les wagons de l’époque). Un convoi ferroviaire très particulier - en ce temps-là il n’y avait qu’un seul train par trimestre - dans lequel les passagers côtoient la mort, un convoi qui est en même temps une image du pays et de la volonté de survie de ses habitants. «Ceux qui attaquent le train sont terribles, mais parfois ceux qui sont censés le protéger sont bien pires encore», dit Rosa, témoignant de la dure réalité de cette guerre.
On a comparé The Train of Salt and Sugar à un western. C’est vrai qu’on peut y déceler des références, mais le film va largement au-delà du schéma réducteur des bons cow-boys et des méchants bandits. Les protagonistes sont des personnages complexes, attachants, et l’enchaînement des événements est parfaitement maîtrisé. Beaucoup de soin a été apporté aux détails et le film sait capter l’attention du spectateur. Le Mozambique reste le sujet principal, le centre de réflexion d’un cinéaste qui connaît bien son pays. Un pays dont on sait par ailleurs qu’il est fragilisé depuis deux ans par une crise politico-militaire et différents conflits armés.

Antoine Rochat