Ordre divin (L')

Affiche Ordre divin  (L')
Réalisé par Petra Volpe
Titre original Die Göttlische Ordnung
Pays de production Suisse
Année 2017
Durée
Genre Comédie
Distributeur filmcoopi
Acteurs Bettina Stucky, Marie Leuenberger, Sibylle Brunner, Rachel Braunschweig, Marta Zoffoli
Age légal 12 ans
Age suggéré 14 ans
N° cinéfeuilles 768

Critique

La réalisatrice italo-suisse Petra Volpe revient sur l’accession des femmes suisses au droit de vote, à travers l’histoire d’un petit village de montagne. Mais surtout de ses femmes, incarnées par un groupe d’actrices réjouissantes.

Les années 1970 : les suites des mouvements estudiantins, le début de la libération sexuelle et un grand pas dans la lutte pour les droits des femmes. Tout cela semble balayer le monde, sauf la Suisse profonde, où rien ne bouge, depuis toujours. C’est en tout cas le propos des premiers plans du film, tout en dérision, et le sentiment de Nora (Marie Leuenberger, impressionnante de justesse), jeune mère au foyer. Figure respectée par le reste du village, elle s’adonne aux tâches du ménage avec bonne volonté. Toutefois, les choses se compliquent lorsque, tentée de reprendre un travail, elle se heurte au refus de son mari. Car oui, en 1971, en Suisse, l’homme décidait encore légalement pour sa femme. Petit à petit, s’imposent à elle les injustices faites aux femmes qui l’entourent. Et elle va se laisser emporter par le vent de libération qui souffle…

C’est à croire que Petra Volpe s’est volontairement cantonnée à une forme classique, pour faire ressortir son propos. Et cela fonctionne parfaitement ! Au travers de figures féminines touchantes, de Nora à celles qui se réunissent autour d’elle, sont posées des questions encore aujourd’hui essentielles. Tout d’abord, il y a la tradition, le poids de tant d’années où « les choses ont été comme ça » et toute la difficulté qu’il y a à s’en détacher. Dans une scène de repas où toute la famille est réunie, le grand-père (et beau-père) trône en bout de table, écrasant de sa silhouette tous les autres, hommes et femmes confondus. Car L’Ordre divin a l’intelligence de montrer aussi les conséquences d’une socitété patriarcale, où il s’agit d’être un « vrai homme » face à ses responsabilités. Même lorsqu’elles nous dépassent.

Toutefois, c’est bien avant tout le (droit de) regard masculin porté sur les femmes qui est au cœur du film. Qu’il soit effectif ou théorique, il pèse sur leurs corps, leurs opinions, leurs droits, indépendamment des âges ou des origines. Par le miroir que nous offre cette époque – pas si lointaine – L’Ordre divin prouve toute son actualité. Est-ce vraiment un hasard si les humiliations et rejets rencontrés par les héroïnes semblent familiers ? Si l’importance d’une solidarité, au moins féminine, apparaît toujours aussi nécessaire ? Voilà une piqûre de rappel bienvenue, sérieuse derrière sa bonne humeur contagieuse. Ces problèmes doivent continuer d’être débattus et combattus. Peut-être qu’au rythme d’Aretha Franklin et des permanentes bondissantes, le message sera plus largement entendu ?

Adèle Morerod