Tourisme international

De son séjour en Corée du Nord la cinéaste Marie Voignier a rapporté un documentaire assez spécial, un film qui décrit comment fonctionne le tourisme dans un  pays de dictature. Les voyageurs sont obligés de passer par une agence spécialisée et d’être accompagnés bien sûr par un guide de l’Etat tout au long d’un circuit rigoureusement programmé. Pas possible de faire un pas à gauche ou à droite. C’est dans ces conditions que Marie Voignier a pu, intégrée à un groupe, visiter quelques sites du pays. Moyen métrage de 45 minutes, Tourisme international nous livre un témoignage  personnel, militant, bien différent sans doute du message que les guides nord-coréens ont tenté de faire passer.
La cinéaste a fait un premier choix qui surprend : elle a décidé de ne pas retransmettre dans la bande sonore de son film les discours et les explications verbales (en langue coréenne) des guides, de postsynchroniser seulement les sons et les bruits d’ambiance et de glisser de petits cartons explicatifs permettant au spectateur d’être informé et de tirer lui-même ses conclusions. Les images ont été prises sans problème, même si l’on peut supposer, ici ou là, qu’une caméra cachée ait été utilisée.
Tourisme International a été tourné sur les places publiques, devant les monuments historiques des hommes politiques, dans les musées, dans un atelier de peinture, un studio de cinéma, une usine chimique. Ont aussi été projetés devant les touristes des séquences des grands spectacles chorégraphiques du régime. Le mutisme obligé des guides permet de mieux voir, de mieux deviner ce qui reste caché, et d’éviter aussi les discours officiels. On en arrive ainsi à douter de ce que l’on aperçoit ou de ce que l’on peut lire sur l’écran.
Le film tente donc d’évoquer et de décrire, en s’adressant à l’imagination du spectateur, quelques aspects du fonctionnement d’un système totalitaire qui cherche à tout contrôler. On souhaiterait bien évidemment en savoir encore un peu plus sur ce qui se passe hors-champ, ce qui est sans nul doute la hantise du régime…