Hannah Arendt

Affiche Hannah Arendt
Réalisé par Margarethe von Trotta
Pays de production Allemagne, France
Année 2012
Durée
Musique André Mergenthaler
Genre Biopic, Drame
Distributeur inconnu
Acteurs Barbara Sukowa, Ulrich Noethen, Janet McTeer, Julia Jentsch, Axel Milberg
Age légal 12 ans
Age suggéré 16 ans
N° cinéfeuilles 681
Bande annonce (Allociné)

Critique

«C’est dans le vide de la pensée que s’inscrit le mal.» Pour Hannah Arendt,  philosophe juive née à Hanovre en 1906, auteur d’un essai sur Les origines du totalitarisme, le mal n’est pas à mettre du côté de l’exceptionnel, du pathologique ou du diable. Il devient extrême avec l’absence de toute réflexion personnelle, l’effondrement moral, la servilité et la dictature bureaucratique.
Envoyée à Jérusalem afin de couvrir le procès du criminel national-socialiste Adolf Eichmann pour le New Yorker, Hannah Arendt est confrontée à l’homme qui a envoyé des millions de gens dans des camps de concentration. C’est au cours de ce procès emblématique qu’elle conçoit sa théorie sur la banalité du mal. «Eichmann protestait qu’il n’avait fait qu’obéir aux ordres. Cette excuse typique des national-socialistes montre clairement que le plus grand mal du monde est le mal accompli par des personnes insignifiantes. Par des gens qui refusent d’être des humains», écrit-elle. Elle fut attaquée de toutes parts pour ses articles et son livre sur le procès Eichmann. Elle ose aussi dans la foulée critiquer le rôle des conseils juifs contraints de donner des renseignements et des listes de personnes dans les pays occupés par l’Allemagne, ce qui aggrava le processus de déportation et d’extermination.
C’est précisément cette période-clé entre 1961 et 1964 que la réalisatrice allemande Margarethe von Trotta a choisi d’évoquer dans le portrait qu’elle fait de Hannah Arendt. La cinéaste, auteur notamment de «L’honneur perdu de Katharina Blum» et de «Rosa Luxembourg», a réussi le tour de force de montrer à l’écran le travail silencieux de la pensée. Elle a osé filmer pendant huit longues et passionnantes minutes le discours prononcé par Hannah Arendt dans un amphithéâtre plein à craquer. Il y faut tout le talent et l’intensité de Barbara Sukowa, l’actrice chère à Rainer Werner Fassbinder, pour imposer à l’écran la parole de la philosophe rebelle qui ne plie jamais, même quand ses amis, exilés aux Etats-Unis comme elle, la désapprouvent et lui tournent le dos. L’actrice parle tantôt en allemand, tantôt dans un américain râpeux, ce qui rend les mots plus cassants. La réalisatrice a choisi, pour la confrontation entre la philosophe et Eichmann, de n’utiliser que des images d’archives du procès. Ce qui nous permet de partager les sensations éprouvées par Arendt lorsqu’elle se trouve face au criminel, un homme terne, se cachant derrière ses lunettes.
Dans ce portrait,  Hannah Arendt n’est pas qu’une philosophe exilée à New-York, elle est aussi une femme  enjouée, amoureuse de son mari qui la soutient dans les moments de tourmente. Son amour pour le philosophe allemand Martin Heidegger, qu’elle rencontra comme étudiante, et qui adhéra par la suite au parti national-socialiste, est évoqué par quelques flash-backs pudiques. Le film fait connaître la pensée de Hannah Arendt et lui rend justice. Il interpelle chacun et l’invite à penser en toute indépendance, sans tenir compte des influences et des pressions extérieures, avec tout le courage que cela requiert parfois pour rester fidèle à son humanité. Le film rend la pensée de l'essayiste compréhensible, simple et claire. Il est une leçon d’histoire et de philosophie qu’on suit de bout en bout sans jamais décrocher.

Appréciations

Nom Notes
15
Georges Blanc 15
Serge Molla 18
Geneviève Praplan 18
Antoine Rochat 17
Anne-Béatrice Schwab 16