Che: l'Argentin

Affiche Che: l'Argentin
Réalisé par Steven Soderbergh
Pays de production Espagne, U.S.A., France
Année 2008
Durée
Musique Alberto Iglesias
Genre Biopic, Guerre
Distributeur Warner Bros. France
Acteurs Benicio Del Toro, Demian Bichir, Santiago Cabrera, Julia Ormond, Elvira Minguez
N° cinéfeuilles 570
Bande annonce (Allociné)

Critique

Bien que mort il y a 31 ans, Ernesto «Che» Guevara demeure un symbole d’héroïsme et d’idéalisme; au même titre que Jean Paul II par exemple, il est une icône dont l’effigie orne encore posters et tee-shirts affichés par les adolescents d’aujourd’hui. On comprend que Steven Soderbergh se soit intéressé à ce médecin argentin qui, au nom de la cause castriste, s’est fait Cubain (quand bien même il a renoncé à cette nationalité par la suite).

Le film de 4 heures et demie - qui sera présenté en deux parties successives, comme MEMOIRE DE NOS PERES d’Eastwood - évoque les années de guérilla cubaine du médecin devenu commandant, fait l’impasse sur la praxis révolutionnaire (direction d’une prison où de nombreux opposants ont été torturés puis activité ministérielle plutôt désastreuse) comme sur l’action en Algérie et au Congo, et décrit la déconfiture bolivienne où le Che a trouvé la mort, flingué par un compatriote.

Entrecoupé d’images d’archives, la narration linéaire nous fait suivre la progression de guérilleros de mieux en mieux organisés, et on ne tarde pas, longueurs aidant, à se lasser de ce camp volant de boy-scouts armés... Reste l’image d’un révolutionnaire croyant en l’homme, attentif aux épreuves endurées par ses compagnons et veillant au respect d’une éthique élémentaire (pas de pillage ni de viols). On nous épargne le terme de lider maximo décerné à Castro, titre trop élogieux pour un dictateur. Et Benicio Del Toro, par sa ressemblance et son engagement dans le rôle, a récolté à bon droit le Prix de l’interprétation masculine, conformément aux critères proclamés par le président du Jury.



Daniel Grivel





Ce premier volet d’un diptyque, consacré à la vie révolutionnaire du Che Guevara, évoque les hauts faits du médecin-guérillero. Et l’origine d’une gloire internationale.

Plus de quatre heures de pellicule partagées en deux films, pour rappeler l’histoire d’Ernesto Guevara dans sa période de combat contre les dictatures, soit l’essentiel de sa vie d’adulte! En voici les deux premières; les deux autres font l’objet d’un second film. Sans rapport avec le travail de Steven Soderbergh, un long métrage de Walter Salles, CARNETS DE VOYAGE (2004), avait fait les présentations. L’Ernesto de cette œuvre-là était le jeune étudiant en médecine qui visitait son continent et en découvrait la misère; il y plantait les racines de son âme révolutionnaire. L’avoir vu est utile car dans CHE: L’ARGENTIN, Soderbergh aborde le héros des années 60 au moment où il se lance dans la politique, sans préambule, ni explication sur le passé de cet Argentin expatrié.

En 1955, la rencontre d’Ernesto Guevara avec Fidel Castro est déterminante, les deux hommes se découvrent un objectif commun, le renversement du dictateur Batista, qui s’est emparé du pouvoir cubain trois ans plus tôt. La première opération de guérilla se conclut par un massacre. Guevara, médecin, s’emploie à soigner les blessés. Vivant désormais dans la montagne, Ernesto devient peu à peu le «Che», plus soldat que soignant, luttant sans répit, mais respectant le droit humanitaire et n’acceptant dans sa troupe que les rebelles profondément motivés.

C’est du moins l’image qu’en donne Soderbergh qui ne s’arrête sur aucun autre aspect de son personnage. Ni ses relations avec sa famille qu’il a laissée quelque part, ni sa liaison avec la jeune femme qui s’est imposée à ses côtés. La guerre, seulement et son objectif de ramener la liberté et la justice à Cuba. Les images sont belles, mais le récit éclaté n’est pas toujours facile à suivre. Le réalisateur décrit en larges plans les marches ponctuées de combats, l’organisation des camps, les entraînements, la dure vie des guérilleros qui côtoient en amis la vie misérable des paysans, la passion révolutionnaire des volontaires. En contrepoint et en noir et blanc se développe l’histoire parallèle du Che, celle de sa place politique dans le concert des nations, son fameux discours de 1964 à l’ONU.

A travers une excellente direction d’acteurs, Soderbergh semble se limiter à l’objectivité des faits; mais, de par les actions qu’il choisit - les plus représentatives -, son récit s’approche plus de l’hagiographie que de l’analyse politique. L’ARGENTIN est le récit de l’épopée qui a renversé la dictature de Batista et, à ce titre, il se présente comme une aventure à relatif suspense puisqu’on en connaît le résultat. Quand au Che, il œuvre ici du bon côté, celui du héros, avec un souci d’humanité qui explique la figure internationale qu’il va devenir. Mais un autre film, documentaire celui-là et réalisé par le Suisse Richard Dindo (LE JOURNAL DE BOLIVIE, 1994), a montré le côté pathétique du héros. Soderbergh en fera-t-il autant dans le deuxième volet, CHE: GUERILLA?



Geneviève Praplan

Ancien membre