Critique
Tous les percepteurs d'impôts ne sont pas des fonctionnaires, mais Harold Crick (Will Ferrell), lui, en est le stéréotype. Grâce à sa montre numérique, il mesure le temps pris par chacun de ses actes, règle toute sa journée, arrive parfaitement à l'heure à son travail. Un jour, pourtant, une petite voix se met à décrire tout ce qu'il fait, dans le creux de son oreille. C'est très dérangeant. Cela devient même exaspérant. Après avoir parlé en vain aux psychiatres, Harold Crick décide de voir un professeur de littérature: un écrivain n'utiliserait-il pas sa vie pour en faire un roman?
En dépit de quelques rebondissements douteux et d'une fin trop facile, ce conte ne manque pas de fraîcheur. Il se base sur une vérité connue: on construit sa vie soi-même, rien ne sert d'attendre que la chance frappe à la porte. Harold Crick aimait jouer de la guitare, mais il a laissé le hasard décider à sa place et n'a jamais développé ses aspirations initiales. C'est la bonne fée littérature qui va le tirer de ce mauvais pas.
La littérature comme instigatrice du changement, voilà l'idée originale de ce film sympathique. Idée originale et culottée à une époque où l'image fugitive et le message encore plus fugitif semblent évincer le livre. Tandis que l'écran de télévision, celui de l'ordinateur et du téléphone s'effacent aussitôt de l'esprit, le texte du livre, lui, chemine longuement dans la tête avant d'y faire sa place. Le lecteur peut s'arrêter, réfléchir, reprendre, comprendre. Comme finit par le faire Harold Crick qui en verra sa vie heureusement bouleversée.
L'INCROYABLE DESTIN DE HAROLD CRICK a été réalisé aux Etats-Unis par un cinéaste suisse. Marc Forster signe une mise en scène dynamique et pétillante. Outre sa sagesse, son film offre au public l'occasion de retrouver l'excellente actrice qu'est Emma Thompson.
N.B.: La Broadcast Film Critics Association a nommé Emma Thompson dans la section Meilleur second rôle féminin et Zach Helm dans la section Meilleur scénario. Will Ferrell est sur les rangs du meilleur acteur des Golden Globes.
Geneviève Praplan
