In America

Affiche In America
Réalisé par Jim Sheridan
Pays de production Irlande, Grande-Bretagne
Année 2002
Durée
Musique Gavin Friday, Maurice Seezer
Genre Drame
Distributeur UFD
Acteurs Samantha Morton, Paddy Considine, Randall Carlton, Djimon Hounsou, Neal Jones
Age légal 12 ans
Age suggéré 12 ans
N° cinéfeuilles 474
Bande annonce (Allociné)

Critique

"Ode à la vie - et à la vitalité d'une ville (New York) aussi -, IN AMERICA est en même temps une méditation sur le deuil et sur la force de l'amour.

Johnny, sa femme Sarah et leurs deux fillettes (Christy et Ariel, 10 et 6 ans) se présentent en voiture à un poste frontière des USA. On est en 1981, ils sont d'origine irlandaise et souhaitent s'installer à New York. A l'officier d'immigration qui demande au père combien il a d'enfants, celui-ci répond: ""Deux"". ""Trois"", rectifie aussitôt la mère. Une double réponse qui surprend autant l'officier de police que le spectateur...

A y bien réfléchir, l'essentiel du film tient dans l'ambiguïté même de cette réponse. La famille a perdu en effet un enfant quelques années plus tôt et cette disparition pèse encore très lourd, même si chacun essaie d'oublier le drame. IN AMERICA, c'est l'histoire - décrite avec beaucoup de tact - d'une famille qui s'efforce de dépasser les souvenirs qui la hantent, une histoire qui, à quelques détails près, s'inspire très directement du propre passé du réalisateur. Jim Sheridan a en effet débarqué avec sa famille à New York, il y a une vingtaine d'années. Il s'est aussi installé, comme Johnny et les siens, dans un vieil immeuble des bas quartiers de la ville. Un univers obscur et caverneux, plein de surprises et de dangers, au milieu de travestis, de junkies, de personnages étranges et hauts en couleurs, comme ce Mateo, leur voisin de palier, un artiste tourmenté qui aidera in extremis la famille des immigrés à tourner la page et à retrouver l'espoir.

Jim Sheridan a écrit le scénario de IN AMERICA en collaboration avec ses propres filles, qui ont émigré avec lui en Amérique en 1981, et il a mêlé aux souvenirs de son arrivée à New York ceux d'un événement familial tragique et plus ancien, celui de la mort (des suites d'une tumeur cérébrale) de son propre frère Frankie. Le film témoigne donc d'un vécu personnel et la principale qualité de IN AMERICA réside précisément dans l'authenticité du propos. Les deux acteurs anglais (Samantha Morton, la mère, et Paddy Considine, le père), relativement peu connus, donnent une excellente interprétation, toute en nuances, de leurs personnages, tandis que les deux fillettes, Sarah et Emma Bolger (Christy et Ariel), sont tout simplement parfaites, d'un naturel stupéfiant, dans leurs rôles pourtant difficiles d'enfants qui sentent combien leurs parents sont fragilisés et portent difficilement le poids de l'absence du frère. Christy et Ariel constituent en fait le centre de gravité du film et c'est à travers leurs yeux, par leurs commentaires et leur humour aussi, que le spectateur découvrira à la fois leur famille et le nouvel environnement auquel tous devront s'adapter.

IN AMERICA n'est pas une histoire triste qui joue sur le pathos. Bien au contraire: l'émotion est retenue et il se dégage finalement de ce film comme une forme d'optimisme, dans la mesure où le cinéaste, au travers des événements graves qu'il décrit, laisse entendre que les dangers qui pourraient menacer l'équilibre de cette famille peuvent être maîtrisés. Il est toujours possible de s'accommoder, dit-il, des inévitables désagréments de la vie quotidienne, mais c'est d'abord par sa propre force de résistance intérieure, par des signes d'amour, qu'on protégera une famille et ses enfants. Père et mère en sont convaincus, ni l'un ni l'autre ne lâchera prise, malgré les difficultés d'insertion professionnelle du père (Johnny, acteur, a de la peine à trouver du travail), malgré le chagrin de la mère qui restera pourtant un modèle d'équilibre et de confiance, rassemblant toutes les forces familiales derrière son propre courage.

IN AMERICA, c'est l'histoire d'une deuxième chance, d'un itinéraire qui mènera sans doute une famille vers une vie nouvelle.





Jim Sheridan: est un cinéaste qui est resté fidèle à son Irlande natale, même après avoir émigré aux Etats-Unis. Ses films en témoignent: MY LEFT FOOD (1989), THE FILD (1990), AU NOM DU PERE (1993), THE BOXER (1997) parlent tous de l'Irlande. Par ailleurs, Sheridan a été le scénariste ou le producteur de beaucoup d'autres films. Il a aussi écrit plusieurs pièces de théâtre."

Antoine Rochat