L'édito de Serge Molla - Film de guerre

Le 25 août 2017


C’est un genre en soi dont certaines images hantent longtemps la mémoire. Chacun y stocke quelques séquences troublantes et terribles, pleines de bruit et de fureur. Associées par exemple au Débarquement de Normandie, elles appartiennent au Jour le plus long (1962) avec son cortège de héros ou se lient au devenir d’un brave soldat, Ryan (1998), qu’il faut impérativement sauver, sa mère ayant déjà perdu ses trois autres fils.

C’est que le cinéma aime les histoires d’hommes ou de femmes qui se surpassent, celles qui transforment les anonymes en figures, et leurs parcours en destins. Et pour cela, la guerre offre un réservoir sans fond.

TuNeTuerasPt2Apocalypse now dénonce le basculement d’un homme et conduit le spectateur au Cœur des ténèbresLa Ligne rouge révèle le tragique passage de jeunes précipités dans l’âge adulte. Plus récemment, Tu ne tueras point, fait partager les convictions radicales d’un objecteur de conscience.

Mais un piège guette bien des réalisations : la diabolisation de l’autre, de l’ennemi.

Clint Eastwood l’évite habilement avec son diptyque, Mémoire de nos pères et Lettres d’Iwo Jima (2006). Non seulement il invite à réfléchir à la construction de la mémoire, mais – c’est si rare – il se soucie des valeurs défendues de part et d’autre.
Le récent Dunkerque ouvre encore de nouvelles pistes. Christopher Nolan y renouvelle le genre par ses audaces touchant tant le fond Dunkerque2que la forme. Délaissant l’héroïsme ou la lâcheté des individus, il offre une plongée hallucinante dans le vécu de centaines d’hommes coincés sur une plage.

C’est peut-être ainsi que ce genre filmique rejoint le plus. – Non en statufiant tel troufion ou tel gradé, mais en rendant palpables les sentiments mêlés de peur et d’espoir, de honte et de fierté, d’angoisse et d’attente, d’abandon et de reconnaissance… Et la guerre de rester humaine, trop humaine.

serge molla